Il y a soixante ans, dans la nuit du 29 mars 1947, éclatait l’insurrection de #Madagascar contre l’oppression coloniale française. Après la guerre, la bourgeoisie française tentait de maintenir envers et contre tout, malgré l’aspiration générale des peuples à l’indépendance, sa domination sur son empire colonial sous l’étiquette » Union française « , opposant la politique de la canonnière à ceux qui exigeaient leurs droits. À Sétif, en Algérie, la manifestation du 8 mai 1945 où apparurent des drapeaux algériens avait été violemment réprimée. En Indochine, le 23 novembre 1946, la marine française avait bombardé Haïphong, faisant plusieurs milliers de victimes. À Madagascar, la guerre s’était traduite d’une part par l’enrôlement de 15 000 Malgaches dans les troupes françaises, constituées en 1944 de trois cinquièmes de soldats coloniaux, d’autre part par une aggravation considérable de la misère de l’île et de l’oppression de ses quatre millions d’habitants autochtones.
Depuis la » conquête » de 1896, ces derniers subissaient le régime de l’indigénat, qui permettait, outre l’exploitation des richesses de l’île – le riz, le café, le sucre, les épices, le caoutchouc… sont exportés vers la métropole -, celle du travail des paysans, à la base de l’enrichissement des colons.
Une exploitation insupportable
Dans la période de la guerre, la réquisition pour l’armée de la quasi-totalité des produits de base et un système de travail forcé gratuit (trente jours par an) vinrent aggraver l’exaspération et la misère des habitants, renforcée par la terrible famine de 1943-1944.
Comme la plupart des populations de l’Empire colonial français, les Malgaches disposaient d’un droit de vote très restreint, mais dès 1945 ils élirent deux puis trois députés qui fondèrent en 1946 le Mouvement Démocratique de la Rénovation Malgache, parti indépendantiste qui attira des centaines de milliers d’adhérents.
L’insurrection du 29 mars 1947 fut immédiatement attribuée au MDRM, pourtant ses dirigeants n’en revendiquèrent jamais la responsabilité. C’est une flambée de colère qui parcourut cette nuit-là toute la partie est de l’île, soulevant la population et affolant les 4 000 Européens. Plusieurs gros colons furent tués. Des partis nationalistes disposant de réseaux clandestins participèrent à l’organisation de l’insurrection, parfois encadrée par les anciens tirailleurs malgaches récemment démobilisés. Le 31 mars, à Tananarive, un camp militaire français était attaqué par plusieurs centaines d’hommes, armés seulement de sagaies et de coupe-coupe. Les quelques fusils récupérés furent les seules armes à feu dont disposèrent les Malgaches, avec celles prises dans les mois qui suivirent aux militaires français.
Après les premiers jours de stupeur, la répression s’organisa. L’état de siège fut proclamé le 4 avril, les autorités coloniales s’employant cependant, dans le communiqué, à minimiser les événements pour rassurer l’opinion métropolitaine. Mais la révolte déferlait, s’attaquant aux fermes des gros colons, aux camps militaires, à tout ce qui incarnait l’exploitation coloniale. La répression s’abattit avec férocité. Des renforts militaires furent expédiés, procédant à des arrestations massives, par des rafles dans les quartiers populaires des villes et dans les villages. L’armée, assistée par les milices de colons, incendiait les maisons avec leurs habitants, exécutait des » suspects « , massacrait les prisonniers.
Répression féroce
Cela ne suffisant pas, le gouvernement envoya encore, contre ces hommes armés de machettes et de lances, l’infanterie, les parachutistes, puis l’aviation. Des bombes furent larguées par soixante avions sur des campements d’insurgés et des villages suspects d’abriter des » mutins « . Au sol, toutes les formes de torture furent utilisées contre les insurgés de Madagascar, des procédés qui allaient être repris par la suite en Indochine et en Algérie. Tout était bon pour terroriser la population : mutilation d’otages, mitraillages de trains, largages par avion ou hélicoptère d’hommes vivants au-dessus des villages, des » bombes démonstratives » comme les nommait la presse française aux ordres.
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