Quand une personne aussi puissante que Daniel Démocrite s’en va il est de coutume de lui dresser une couronne de lauriers.
Tout ou presque a été dit sur la carrière de ce grand ténor qui a marqué le barreau de la Guadeloupe d’une empreinte indélébile.
Toutes les grandes affaires auxquelles il a prêté son talent. Toutes les grandes causes sont connues. Il nous reste à essayer de transpercer la robes de l’avocat pour atteindre l’homme.
D’abord Daniel était un homme généreux et tout ceux qui l’ont approché ont eu à apprécier cette douceur d’être, son extrême sensibilité et quelque chose de détonnant de l’ordre de la féminité en contre point de sa stature virile.
Oui, Daniel était un homme bon qui aimait la vie, les arts, sa famille, ses us et son pays.
La vie et ses douceurs qui pour lui étaient essentielles ; le baba au rhum, le ris de veau, le chirurgien grillé mais aussi tout les plats du terroir goûteux et savoureux sans oublier les grands vins surtout de Bordeaux et bien-sûr le rhum.
De son extraordinaire aventure à côté de Jacques Vergès à La Réunion où il se rendit une dizaine de fois pour défendre Pierre, le fils de Paul Vergès. Il fut subjugé par les saveurs du rhum arrangé de l’île Bourbon qu’il accompagnait d’un curry pat cochon qu’il doublait d’un curry de zourit.
Tel un ogre affamé de saveurs inconnues mais qui ne lui étaient pas totalement étrangères.
Ce que beaucoup ignoraient est sa passion pour les arts notamment l’art contemporain de la Caraïbe.
Au file des années Daniel Démocrite est devenu l’un des plus grands collecteurs de grands peintres guadeloupéens et martiniquais dont il était devenu l’ami ; Henri Guédon, Louis Laouchez, Thierry Alet, Rovelas, Laurent Valère et j’en oublie.
Sa maison du Gosier était devenu un véritable musée avec sans oublier son exceptionnelle collection de marques et statues africaines.
C’est à Dakar qu’il fit son baptême initiatique de cette Afrique qu’il aimait tant où du matin au soir il sillonnait le pays sénégalais s’abreuvant de saveur, de couleurs, de sons, d’émotions qui le ramenaient en profondeur à ses origines qu’ils revendiquaient de nègre fondamental.
Sa famille était le pivot central de sa vie. Sa chère et tendre Sylvia avec qui il partageait tout et tant. Son fils Richard et sa fille Gladys, deux doubles icônes démocritiennes. L’un dans la force, l’autre dans la sensibilité étaient la prunelle de ses yeux.
Il y avait aussi à ses côtés sa fidèle et incontournable assistance, Gertie Nayagon. Madame Nayagon, comme il aimait à dire, sans qui rien dans la vie de ce géant n’aurait été possible.
Et puis il y avait ses amis. Ses frères comme il disait. De combats et de rires.
Eux qui savaient qu’ils pouvaient compter sur lui a tout moment’ de fêtes ou de douleurs, il était toujours là ; rassurant, protecteur, déployant des trésors de délicatesse, toujours fidèle.
Son pays enfin cette île qu’il a découvert si tard ayant passé son enfance et son adolescence entre Paris et le lycée international de Fontainebleau qui faillit faire de lui un Préfet de la République si les circonstances tragiques ne l avaient pas contrarié d’où il retira l infatigable goût pour le combat contre le racisme et la bêtise humaine.
De la ressortait l’empreinte d un père syndicaliste fortement engagé pour le combat pour l’égalité sociale et une mère aimante et protectrice qu’il aimait du fond du coeur.
Il est et restera toujours un exemple à suivre pour les futures générations.
Adieu l’ami. Adieu Démo. Que la terre Guadeloupéenne te soit légère, inoublieuse de tous tes talents, de ta sagesse africaine et de tes colères d’homme libre.
gilles dégras