Et pourquoi pas au soulèvement des peuples Martiniquais, Guadeloupéens, et bientôt Guyanais et Réunionnais qui, depuis longtemps, ont décidé de mettre un terme à la scélératesse et à la « profitation » exercée par le pouvoir central jusqu’au plus profond de chacun, relayées par les puissances économiques que les cubains appellent «tiburones» (les requins mais aussi égoïstes et profiteurs). Ces derniers, invisibles physiquement mais qui détiennent les leviers de développement et d’épanouissement des populations, trouvent aujourd’hui, me semble t il, des rémoras (poissons ventouses des requins) pour expliquer yaka-fokon, pour dire wisésa, nonsépasa, koutépoutann, tannpoukonpwann etc.. etc…comme des hauts parleurs de sagesse et de haute intelligence utilisés pour calmer, détendre et entretenir certainement l’admiration de leurs afficionados (fans).
Ils savent pourtant que la souffrance qui crie dans la rue n’est pas uniquement celle du ventre, du corps et de la tête, mais celle de la résistance au génocide et à la déportation tranquillement organisés par les puissantes minorités de pouvoir. Une déportation vers un ailleurs, sans terre, incolore, de plus en plus froid, sans passion, et tout à fait à la mesure d’un si petit pays, pour de si petites mains, pour une si petite population, pour de si petites revendications … Il vaut mieux qu’ils se diluent dans l’immensité universelle pour oublier leur solitude et leurs chimères. Ainsi pourrons nous leur exprimer notre affectueuse solidarité justifiant ainsi notre vision du monde , pensaient certainement les grands stratèges coloniaux qui ont décimé des peuples au profit de leur enrichissement et de leur puissance. Sa ki pa kontan ka pati !
Nos penseurs du manifeste, les yeux rougis par la lumière factice du laboratoire qui désagrège leur agressivité, leur pugnacité, leur rage de gagner, ne sentent plus la sueur, l’urine, les odeurs profondes de la dynamique, de la chaleur de la rue, ils ne voient plus les masques (les leurs ne se sont pas posés depuis longtemps) et n’entendent plus les danses, les chants, les tambours, les fesses des femmes et les cris de guerre qui entament inexorablement pourtant les cadènes du vaisseau amiral de l’assimilation bien pensante dénoncée par les élus du peuple et les politiques responsables.
Je voudrais demander juste deux choses à l’intelligence : 1°) Serait il possible de m’expliquer pourquoi l’analyse, certainement pertinente, s’embarrasse t elle de tant de mots, d’un tas de mots pour perdre de vue les objectifs de la lutte pourtant clairement affichés par les Collectifs de la Guadeloupe, de la Martinique, bientôt de la Guyane et de la Réunion ? 2°)- Pourquoi leur talent, malheureusement plus à expliquer qu’à traduire, ne peut il affirmer simplement et sans contorsions verbales aux autorités concernées et qui leur prêtent oreille, que le vieux monde colonial est fini, que le changement qui s’opère là devant nous est porté par des femmes, des jeunes, des enfants, des hommes et des « grandes personnes » qui en ont assez d’être couillonnées par la justice, par les belles paroles, par les grands mouvements, par les belles manières, qui en assez d’être des bêtes de somme tout justes bonnes à la compassion et à l’encouragement… à quoi faire ? A enrichir les puissants jusqu’à n’en plus pouvoir.
Auraient ils oublier qu’il s’agit d’un jeu certes, mais d’un jeu tragique ? Celui du dominant-dominé, du welto, celui du malin qui se transforme en faible, celui du « loup et de l’agneau », celui de « l’ile aux esclaves », celui du profit sur le dos des asservis. Un drôle de jeu qu’ont dénoncé Luther king, Aimé Césaire, Jean Jaures, Morisseau Leroy, Rosa Parks, Gandhi et bien d’autres…
Allo, qui est à l’appareil ? Je n’entends que la clameur de la rue qui envahit ce monde désorienté et perdu qui s’écroule inéluctablement. J’entends les chants guerriers, je danse ma fierté et je hurle mes espoirs dans le nouveau monde, et puis je piétine ma peur de n’être pas comme il faut.
La lutte ne s’arrête jamais parce qu’elle nous constitue.
José ALPHA