Bondamanjak

Comprendre notre défaite au lieu de peser des oeufs de mouche…

Par Édouard Delépine.

(…) Il me semble que le plus important pour un militant #PPM c’est d’abord de comprendre notre défaite et pour cela de commencer par l’admettre.
Nous n’avons pas été victimes d’une fraude électorale massive, comme cela a pu être si souvent le cas dans le passé, mais d’une alliance moins inattendue que naturelle chez des gens qui n’avaient qu’un objectif : battre Serge Letchimy. Pour eux, #Letchimy était moins le candidat de #EPMN que le symbole, qu’il fallait briser, de l’Unité reconstituée du PPM après le départ de Claude Lise en 2006 et de l’autorité retrouvée de ce Parti au sein de la gauche et au-delà de la gauche.
Cette conjuration de la revanche des vaincus de 2010 (le rejet du 74 et les régionales), de 2011 (les sénatoriales) et de 2012 (la présidence du Conseil général) a su attendre son heure et préparer son retour.
Il ne faut pas seulement en prendre acte. Il faut en tirer les leçons. Mais surtout en ce moment très important de notre vie politique, pour reprendre le mot de Marivaux, il y a sans doute « mieux à faire que de peser gravement des oeufs de mouche dans des balances de toile d’araignée » . Avant de critiquer ceux qui nous ont battus, il nous faut d’abord nous occuper de ce qui à nous a fait perdre.
Ou nous avions tout bien et tout beau, notre bilan comme nos perspectives, et nous avons été incapables de les mettre en valeur aux yeux des électeurs, autrement dit de leur faire partager nos convictions.
Ou bien nous étions beaucoup moins bien que nous ne le croyions, nous avions des faiblesses et nous n’avons pas su nous en apercevoir pour les corriger à temps, y compris au cours de la campagne électorale.
Bien entendu, il appartient à chacune des composantes de Ensemble Pour une Martinique Nouvelle (EPMN) d’étudier, en interne d’abord, mais au grand jour le moment venu, les raisons de notre échec. Je ne crois pas aux réactions à chaud. Seule une confrontation loyale des points de vue, sans agressivité mais sans complaisance, peut apporter une réponse satisfaisante aux légitimes inquiétudes nées des résultats que nous avons obtenus.
QUAND ON A LES ÉLUS QU’ON CHOISIT, ON A LES ÉLUS QU’ON MÉRITE
C’est en tout cas ce que s’efforcera de faire le PPM. Sans appeler à la résistance au verdict du suffrage universel, sans en aucune manière mettre en doute la légitimité du président élu de la Collectivité territoriale ni celle du président de l’Assemblée, même si nous n’avons personnellement aucune considération pour quelques uns au moins de nos vainqueurs et même le plus profond mépris pour certains d’entre eux.
On leur doit autant de respect qu’on en attend d’eux pour l’opposition. Le PPM, pour ce qui le concerne, soutiendra loyalement le président Marie-Jeanne chaque fois qu’il prendra une décision qui lui paraîtra mériter de l’être. Il s’opposera avec la même fermeté à tout ce qui lui semblera contraire aux intérêts du pays. Mais son rôle ne sera pas seulement de s’opposer. Il sera aussi de faire des contre propositions en des termes acceptables par la majorité et en tout cas susceptibles d’être comprises par nos électeurs et par le pays.
Ce faisant, le PPM ne perdra jamais de vue ce qui est sa vocation fondamentale :
travailler inlassablement au rassemblement le plus large possible. C’est dire que le Gran sanblé pou ba péyi-a an chans n’a rien qui doive nous choquer. Même pas les circonstances de cette alliance conclue, non au grand jour mais, entre deux tours du scrutin, au cours d’un tête à tête nocturne, dans une chambre d’hôtel, entre le président du MIM et le candidat officiellement investi et adoubé par les envoyés spéciaux des Républicains de M. Sarkozy (Mme NKM en juillet et M. Bruno le Maire en novembre).
Il y a près d’une vingtaine d’années quand Alfred Marie-Jeanne a fait ce que nous n’avions pas osé faire, en 1998, se rapprocher de celui qui était alors le chef incontesté de la droite de notre pays, Pierre Petit, je signalais à mes camarades qu’il y avait peut-être quelque chose à tirer de l’alliance entre les indépendantistes et les départementalistes.
« Si dans l’intimité close de leur concubinage, ils ont pu se découvrir et s’apprécier mutuellement, s’assurer que les départementalistes ne sont ni séropositifs ni relégables, que les indépendantistes ne sont ni pestiférés ni infréquentables et vérifier que Marie-Jeanne n’est pas plus Satan que Pierre Petit n’est Belzébuth, tant mieux » .
Pour des raisons évidentes, la période qui vient ne peut pas être une période facile pour nous PPM. Mais loin de nous en indigner ou de nous en affliger, la situation actuelle doit renforcer notre détermination et notre conviction qu’il n’y a pas d’obstacle infranchissable sur la voie de la réalisation du plus grand de tous les rêves césairiens :
le rassemblement du peuple martiniquais tout entier dont l’émancipation ne peut pas être l’oeuvre d’un seul parti mais le fruit de la coopération de toutes les forces vives du pays dans une commune espérance et une inébranlable volonté de voir reconnaître la personnalité collective du peuple martiniquais pour faire vivre et prospérer la nation martiniquaise.

Édouard de Lépine, militant du Parti Progressiste Martiniquais