Je pensais écrire cet article en 2020.
1995 – 2020. Un quart de siècle de vie consacré à l’imagerie en Martinique. Mais les mensonges, les stratégies foireuses de certains, l’amnésie et surtout leur narration sélective m’obligent à le faire quatre mois avant.
En 1993, après 9 ans en France le pays des droits de l’homme, je rentre dans l’île d’Aimé Césaire et je rencontre le brillant et singulier, Jean-Marc Remer. Une belle et plurielle aventure médiatique. commence. 4 octobre 1994 sort le premier numéro de la version papier de Bondamanjak. Juin 1995, la grève des banques longue de 4 mois est passé par là. L’hebdomadaire satirique part en sucettes.
Jacques et moi, nous avons de la chance. José Huygues-Despointes, Monsieur Glaces et Floup du groupe crée par son père Alain, n’en peut plus des créations publicitaires à la con pondues par l’Agence Publicara. Marc Brunier est affolé.
José réclame des créatifs locaux sinon il se casse avec ses budgets. Il y a péril en la demeure. De fil en aiguille, nous sommes contactés Jacques et moi. Et nous voilà concepteurs rédacteurs en publicité.
Le milieu de la publicité en Martinique vit cette nouvelle donne très mal. C’est un séisme créatif. On nous appelle les « Gag men créolophones ». On découvre un monde blanc…clairement raciste. On nous surnomme Dupond et Dupond. Pourquoi ? Parce qu’on arrivait le matin dans la même voiture. On allait manger ensemble à la Galleria. Et on repartait ensemble le soir. Je n’avais pas de véhicule.
Notre premier jour de travail en septembre a été un bizutage exquis. Olivier Dubois, un créatif de l’agence, s’autoproclame, notre supérieur hiérachique. Le midi, il nous invite à manger au Pitt du Mirador au Lamentin. Il est sûr de ne pas y rencontrer d’autres publicitaires qui partagent sa dimension pigmentaire .
Il annonce qu’il va régler la note. Pourtant…nous ne prenons pas de homard. Entre deux bouchées, il annonce la couleur : « Nous sommes la risée de l’île » . Il est le chef. Ok. On bosse alors. Nous devons intégrer ce nouveau métier et on le fera très vite surtout que Jacques a fait…sup de pub à Paris.
On adore ça. On reste même travailler entre midi et deux.
Fin novembre, les briefs des clients déboulent. Olivier Dubois, lui, a un plan…car on l’emmerde car nous sommes efficaces. Son plan est pourtant fin. On a une masse de boulots et lui il part en vacances. Son truc est simple, les deux négros se plantent et je reviens en janvier comme le messie, le sauveur. Erreur totale.
En trois semaines, on bosse comme des malades. Les campagnes sont bouclées comme jamais. On découvre le Studio Coup de Force de Fabien. Il est boss. Plus besoin d’aller sur place. On gère ça au phone.
Les clients sont aux anges. Jacques est un DA en puissance et on gère les dossiers en aveugle. On trouve les idées en voiture, sur les chiottes, dans les escalators, chez nous. Partout.
Notre plus gros chantier…c’est le lancement de la glace Vanille Pacane. Un énorme enjeu marketing pour Miko.
On prend un risque lui aussi énorme. On décide de travailler avec François Gabourg. C’est le début de la 3D. C’est le début pour tout le monde. À l’époque l’univers de la pub ne jurait que par Froons. Très bon le gars mais cher. Gabourg débute..;tout comme nous. Notre directeur Marc Brunier nous averti « Si vous vous plantez…on arrête la collaboration ». Oups. Mais sa fèb.
On passe deux jours, deux nuits chez Gabourg. La campagne doit démarrer avant noël. C’est chaud. C’est notre combat et on va le gagner. François au bord de l’épuisement nous appelle. Premier visionnage. On aime. On part avec une disquette de 3 pouces 1/2. On croise les doigts. Le client vient visionner. Et…il nous envoie un mot de…félicitations. GREAT.
Mais c’est le début d’une autre bataille. Ce binôme pose problème. Nous sommes deux plus Olivier Dubois. Trois salaires au lieu de deux. Brunier se tortille les cheveux de la tempe gauche ou du moins ce qu’il en reste. Les autres employés-es de l’immeuble nous soutiennent . Surtout les indigènes. Flore notre petite soeur est notre tuba. Marc est emmerdé…tous les jours il nous demande… « C’est qui qui trouve les idées ? ». Notre réponse est toujours la même. « Les deux ».
Un nouveau brief viendra mettre un milieu dans ça. Il faut une nouvelle communication pour Caresse Antillaise. Et pour la première fois dans une agence, 3 créatifs vont être en compétition. Deux objectifs gagner le budget et être parmi les deux créatifs qui resteront. Ambiance . Jacques et moi on fait semblant de bosser dans notre bureau. Olivier nous convoque pour travailler à trois.
Du coup j’invente un truc à la con. La machine à laver un slip. Le slip c’est une mauvaise idée et on tourne en rond pendant des heures. Ça dure une semaine.
Entre temps, les deux nègres ont déjà pondu leur idée.
Le jour J arrive. On doit présenter les créations. Et on gagne.
Je souris. Marc Brunier regarde mon tee-shirt et lâche un « …putain… »il rigole…il vient de comprendre. Depuis trois jours je portais le même avec inscrit dessus…LE NUL PART AILLEURS.
L’agence assure. On gagne des compétitions contre…Corida notamment… Biométal une bataille qui mérite à elle seule un roman .
J’arrive à la présentation chez le client au Robert sans aucun document. Pas une image. Rien. Marc et Jacques me laissent faire. Ils n’ont pas le choix. Et on gagne.
Aussi, dans le groupe Publidom, on sait utiliser les ressources. Du coup, je me retrouve dans l’agence C’ Direct dirigé par Emmanuel de Reynal. Leur team créatif est à la rue. Je vais devoir apporter du sang neuf. Emmanuel est un créatif frustré qui frustre Jean-Philippe Roger (un créatif pourtant brillant) qui est son exécuteur. Son nègre en publicité. On est au début de l’internet. J’adorais les moment de connexion où le modem crépitait comme une folle. Je maîtrisais de plus en plus le fait publicitaire.
Ce milieu me permettait de rire de la bêtise des gens qui pensaient que l’argent pouvait les rendre intelligents. Un jour, je suis dans le bureau de Roger de Jaham le patron du groupe pour réclamer un meilleur salaire et je l’entends dire : « SI VOUS VOULEZ PROGRESSER DANS CE METIER, IL FAUT QUITTER MON ENTREPRISE ». La phrase claque dans mon dos comme un fouet dostalynien. Je suis KO debout.
Je comprends mieux pourquoi on faisait venir un quador de Paris pour « faire » une création pour Peugeot. Le mec n’avait rien foutu. Jacques avait tout fait et ce glaire ramassait les lauriers.
Le lendemain, j’en parle à Jacques. Je lui dis : « Je vais tout faire pour qu’ils me virent ». Nous sommes en 1998. Jacques lui , n’ayant pas envie de faire dans le hard, démissionnera.
Moi, je mets en route à C’Direct. Je fais mon boulot carré. Je suis même provocateur. Quand on me remet un brief …je démontre avec mon chrono que je peux concevoir et rédiger un spot radio en 7 mn. Emmanuel de Reynal me demande ce qui se passe. Je réponds…un…rien.
15 jours plus tard. Il me convoque pour un entretien préalable un truc à la con où on vous laisse une période pour vous ressaisir. Je dis oui bwana et je remis une couche dès le lendemain. Finalement je suis licencié. Avec les 50 000 F que j’obtiens, Jacques et moi on prend un local au Patio de Cluny, on achète des ordinateurs. Notre bureau a une mezzanine. Ce qui nous permet de partager le loyer avec le Secteur A Tropical l’entreprise de Olivier Laouchez.
Et le hasard veut que pour notre premier budget, on se retrouve en compétition avec…Publicara . Et on gagne le lancement du SICEM ancêtre de la CACEM contre mon ancien employeur. DuponDupond bat …Publicara. Roger de Jaham est furieux…il tousse son fiel : « Quand les gens sont bons on les laisse partir ». Amnésique le créole.
Le meilleur est à venir. Effectivement ils sont conscients que je suis bon. Comme le disent Emmanuel de Reynal , et l’escroc catholique Jean-Claude Dolmen . Oui je suis bon mais libre. Je ne suis dans aucune secte religieuse et autres. Mon souci c’est la vérité dans un univers construit par la violence des mensonges.
En 2009, la Martinique est en crise. Emmanuel de Reynal pond une affiche pour tenter de calmer ces nègres qui croient trop au 22 mai. Un énième truc à la con qui sort de son cerveau d’enculé.
Les grévistes montent sur des échelles pour déchirer cette 4X3 au niveau du pont Démosthène. Une première. La voix humide et lacrymale, Il m’appelle . « Gilles…je ne comprends pas toute cette violence. Qu’est -ce qui se passe en Martinique ? ».
Je lui réponds tout de go « Mets toi à la place de mes ancêtres et tu comprendras ».
Et puis il y a Tous Créoles…une arnaque sans nom que j’ai toujours dénoncé. Un jour Roger de Jaham demande à Maryline Laouchez (une femme charmante) qui était à C’Direct de me convoquer. Je suis habitué à ce genre de traitement. Serge Letchimy avais demandé à son directeur de cabinet de le faire.
Robert Parfait aussi un jour ou j’avais déploré le prix exorbitant de ses tomates grappes vendues à Hyper U. Dans ce type de rencontre, le demandeur tente toujours d’être en nombre. Chez Parfait ils étaient 6. Chez de Jaham 5 dont Emmanuel de Reynal. Moi seul…Ok. Et ce jour j’ai dit à RDJ que s’il avait crée TOUS MARTINIQUAIS …j’aurai été l’un des premiers à adhérer. Le mot créole me dérangeait car je ne suis pas créole. Nous nous sommes quittés sur cette vision du monde d’autant que son ancêtre était moins qu’un esclave car il n’avait pas de valeur marchande.
Donc…Emmanuel de Reynal…toi et tes amis-es enculés-es j’ai compris votre stratégie. Vos alliances bidons de suceurs de cockpit auront du mal à aboutir. . Je vous fais une promesse. Désormais tous les coups seront permis. Au fait je n’ai JAMAIS été ton ami. Et ça tu auras les moyens de le comprendre. À suivre.