Autre origine du problème : l’octroi de mer.
Il a augmenté en 2005. Nos élus auraient décidé de titulariser les emplois de contractuels dans les mairies (qui verrait là une forme de clientélisme ? Il faudrait être fou !). C’est aux martiniquais de payer la facture car nous payons ici une double taxe ; nous payons déjà la TVA et nous payons une deuxième taxe sur nos achats : l’octroi de mer.
Nul ne saurait ignorer que la passage à l’euro (sauf l’INSEE apparemment) a entraîné une hausse des prix vertigineuse. Sauf peut-être nos élus qui ne fréquentent pas beaucoup les supermarchés.
Les produits épargnés…
Bienheureusement, certains produits échappent à cette liberté des prix : énergie (carburants, en outre suffisamment taxés par l’Etat), électricité, transports publics, ambulance, taxis (là encore comment contrôler sans taximètre ?), téléphone, livre (Mieu merci pour les intellectuels !). Les prix de ces produits sont contrôlés par l’Etat.
Avant l’Euro, après pas « euro du tout… »
Chez nous, avant l’«Euro» les prix étaient déjà très élevés par rapport à la métropole. Si bien que nos compatriotes profitaient de leurs vacances en France pour faire les soldes d’où ils ramenaient de quoi se vêtir pour une année, ce qui permettait de rentabiliser le voyage. Là bas, le martiniquais constatait que son pouvoir d’achat augmentait de 50% et non des 20 % officiels (D’ailleurs le mystère reste entier sur les soi-disant calculs de l’INSEE et sur le fameux panier de la ménagère qui frise une consommation digne du moyen-âge …). Après l’euro, les prix se sont envolés… L’inflation a atteint des sommets : sur les mêmes produits, mêmes marques, l’inflation atteint 300 à 400 % en moyenne (3 à 4 fois le prix antérieur). Cette inflation est comparable à celle enregistrée pendant la première guerre mondiale et la seconde, sauf que nous ne sommes pas en guerre !
Il faut le dire, le système de l’autorégulation est une doctrine qui ne fonctionne pas dans notre île. L’île est petite, les commerçants des grandes surface se connaissent tous et se surveillent pour pratiquer à peu près tous les mêmes prix. Le consommateur ne peut pas aller ailleurs, il est pris en otage.
Que font les organismes chargés de mesurer l’inflation ? (c’est vrai, ils sont sous la tutelle de l’Etat – l’Etat a donc intérêt à ce que la vérité ne se sache pas – C’est vrai aussi que s’ils nous font le coup du panier de la ménagère, on n’a pas besoin d’eux, merci).
Le système de l’autorégulation ne semble pas fonctionner pour nous, dans nos îles étroites. Les prix des marchandises sont même parfois fixés en dépit du bon sens par des moyens que la morale m’interdit d’exprimer ici par respect pour nos lecteurs. Si bien que certaines
marchandises atteignent des prix de produits de luxe alors qu’elles n’en sont pas, ou sont vendues à un prix qui n’a aucun rapport avec leur valeur initiale. Le consommateur le sait et les martiniquais sont de plus en plus furieux de cette situation. Ils communiquent entre eux (précisément, l’île est petite et tout se dit, se répète, et peut s’enflammer…). On a enregistré actuellement une baisse de la consommation (4 fois moins que d’habitude). Cette baisse de la consommation est liée à l’endettement colossal des ménages (là encore, on n’en parle pas, comme s’il était tabou d’évoquer ces questions…).
Sur RFO, au cours d’une interview, les commerçants ont avancé l’hypothèse d’une déprime des consommateurs à la suite du crash. (NDLR : C’est plutôt leur cerveau qui est victime du crash)-Cette hypothèse nie la réalité martiniquaise. Les commerçants ne veulent pas regarder les choses en face : ils ont tellement profité des consommateurs, pratiqué des marges inadmissibles que les consommateurs sont à bout. Le système se mord la queue. Là encore on ne prend pas ses responsabilités. C’est la politique de l’autruche. Bientôt la baisse de la consommation sera liée au réchauffement de la planète. Comment des journalistes dignes de ce nom peuvent-ils ne pas commenter ce genre de propos ?
La situation est en fait explosive. Les martiniquais s’organisent, essayent de trouver des solutions afin de « contourner les marchés habituels de la grande distribution ». Situation, là encore, que l’on ne trouve que dans des situation de conflits. M. B , qui est mère de cinq enfants, est révoltée. Elle insiste sur le fait que cette année, elle ne veut pas consommer, car « elle en a marre de se faire avoir ». C’est là le vrai problème de la baisse de la consommation. Les consommateurs sont excédés. Certaines personnes parlent même de « résistance » pour
désigner une attitude qui consisterait à ne pas acheter des produits aux marges manifestement trop importantes et à limiter sa consommation au strict minimum. Si bien que les petits commerçants commencent à subir les effets de ces comportements et connaissent de grandes difficultés pour boucler leurs fins de mois. « Tout est payé à crédit » m’a confié l’un d’entre eux.
La solution est sans doute entre les mains des citoyens, car enfin, ne faut-il pas reconnaître que l’ordonnance du 1er décembre 1986 est un vrai fiasco chez nous et conduit à l’endettement des citoyens ? Face à cette situation, les consommateurs optent pour des attitudes différentes. L’histoire peut-elle expliquer cette attitude de soumission que nos compatriotes martiniquais adoptent quelquefois ? « Il nous faut des neg-mawon de la consommation » m’a exclamé un collègue.
Lorsque l’on évoque ces problèmes en présence de commerçants, ils évoquent tous les « coûts du transport et l’octroi de mer ». Evidemment, on s’y attend, aucun ne va oser dire : c’est vrai on exagère, on fait n’importe quoi et on est en train de payer… le revers de la médaille…
L’octroi de mer est l’excuse des commerçants mais n’est pas seul responsable. X. B, un consommateur affirme : » Comment ils (les commerçants) peuvent dire une chose pareille puisque les yaourts par exemple, D….et Y… sont produits ici, qu’est-ce qui justifie qu’on les vende à 7 euros (45,50 F). »
Il m’a même été dit : « Mais il ne faut pas convertir ! » Voilà une attitude intéressante que les commerçants espèrent évidemment des martiniquais.
Si certains commerçants et employés du commerce ont vu leurs revenus augmenter. Je rappelle aux commerçants que le passage à l’euro n’a pas été suivi d’une augmentation des salaires des fonctionnaires et des salaires en général. Lorsque les salaires n’augmentent pas, il ne peut y avoir de croissance, car la consommation ne peut augmenter .
Le système a donc une fin. On assiste peut-être aujourd’hui, à ses limites…
Marie-Line Boulogne.