Bondamanjak

En un tour de main

EN UN TOUR DE MAIN.

Quand le peuple noir prend conscience du poids de son existence.
Quand une génération se lève sous le regard attentif des sages (Toussaint Louverture, Martin Luther King, Thomas Sankara, Steeve Biko, Malcolm X, le Che, Léopold Lubin, Eugène Lacaille, Lumina Sophie, Louis Telga, Daniel Bolivard pour ne citer que ceux-là)
Quand le monde occidental, ne pouvant faire autrement, abdique dans certains pays jadis malmenés, colonisés, pillés, décimés.
Au moment où vous lisez mes mots, (la traite négrière) est plus que jamais présente dans nos sombres régions mais sous d’autres formes.

LE DETOURNEMENT DE NOS EFFORTS.

MATINIK mwen enmen’w mé, fout sa rèd lè mwen ka wè dé bagay !

Le béké, descendant de colons invite, reçoit, nourrit, détourne et récupère notre pensée, nos prises de conscience, notre fierté et nos luttes, en les monnayant, comme si tout avait un prix, même la dignité humaine.

Une grande délégation du Bénin, ancien royaume de Dahomey et donc berceau de l’humanité, symbole de la religion vaudou, d’une population de 13 millions d’habitants, donc offrant un potentiel marché, sera bientôt reçue en Martinique ; ce pays se verra invité, ses représentants officiels composés du Président de la république, d’élus et d’artistes seront accueillis dans notre pays par ceux qui jadis et jusqu’à ce jour, nous manipulent et nous traitent en sous-hommes.
Cette réception en grande pompe prévue au départ le 16 décembre 2023 dans une salle de prestige à Fort-de -France se fera finalement le 14 donc deux jours plus tôt dans un des grands domaines du groupe béké au François avec le fleuron de la musique Martiniquaise et un parterre d’invités qui se sentira plus qu’honoré d’être là.

En ma qualité d’artiste musicien qui exerce depuis près de 35 ans, pour avoir été contacté au poste de chanteur principal dans ce grand orchestre mythique, j’ai dit non, non à cette mascarade moderne, pleine d’injures et de crachats, non, parce que je considère qu’il n’y a pas plus grand mépris que de cautionner l’inacceptable.

Je repense au non-lieu du chlordécone, je repense à la vie chère ou plutôt à la vie hors de prix pour la très grande majorité de la population, je repense aux bénéfices indus, je repense également au vol des terres par leurs ancêtres, je repense aux constructions de centres commerciaux sur des zones protégées, je repense aux mangroves saccagées, Génipa et tant d’autres ; et là, je suis contraint d’associer tout cela à une mascarade, à du mépris.

MATINIK mwen enmen’w, mé la sé twop.

Comme a dit un grand homme de lutte (Martin Luther King) : à la fin, nous ne nous souviendrons pas des mots de nos ennemis, mais du silence de nos amis.
A bon entendeur.

Le 25 novembre 2023 Luc LABONNE.