Dans une époque récente le monde économique martiniquais a fait la preuve de sa capacité à trouver des solutions consensuelles, quand face à une flambée de conflits sociaux, des dispositifs de négociation avaient été pensés pour établir un dialogue social pérenne entre employeurs et syndicats. C’est une dynamique du même type qu’il s’agit de mettre en œuvre dans la situation présente. Cette fois il s’agit d’établir un dialogue et un plan d’action constructifs entre acteurs économiques et acteurs politiques. Le monde économique, à travers un outil comme Contact-Entreprises a lancé certaines initiatives. Le Conseil Régional, à travers un certain nombre d’annonces, semble sensibilisé à cette nécessité. Mais à situation exceptionnelle, il faut des solutions exceptionnelles, et mettre en place des actions très significatives. Il faut manifester très clairement la volonté commune de trouver ensemble les solutions de sortie de crise.
Il existe dans le monde des exemples de ces élans de solidarité volontariste qui ont permis à des sociétés de sortir de crises économiques majeures. Nous ne remonterons pas au cas historique du Japon d’après-guerre connu comme l’initiative du MITI et qui permit à ce pays de sortir de la crise d’une manière exemplaire. Plus près de nous, nous avons un exemple spectaculaire de ce volontarisme – du type patriotisme économique – à Barbade.
Le professeur d’économie Michel HERLAN nous en fait une description très éclairante : « En 1991, face à une situation qui s’apparentait à la quadrature du cercle, les Barbadiens ont su faire preuve d’imagination créatrice. Des discussions se sont déroulées entre les trois parties concernées: les Travailleurs représentés par les organisations syndicales du secteur public et du secteur privé; les Patrons regroupés au sein de la Confédération des Employeurs de Barbade, et le Gouvernement… Une solution a finalement émergé officialisée par un vote au Parlement en Août 1993. Des protocoles biennaux de mise en exécution ont été établis (1993/95-1995/97 etc.) ». Michel HERLAN conclut : « Cet épisode est révélateur d’un modèle social dominé par la recherche de consensus, la volonté de parvenir à des solutions raisonnables », un état d’esprit inverse – on peut le noter – de celui qui tend à prévaloir dans un certain nombre de DOM. A cela s’ajoute une grande continuité dans les orientations politiques, au delà des changements de majorité, et, last but not least, le respect des règles du jeu d’une démocratie libérale. Si cela ne suffit peut-être pas à donner la clef du succès, il y a là sans doute plus qu’une coïncidence entre la maturité politique dont fait preuve la Barbade et ses performances en matière économique et sociale.
C’est de cette maturité qu’avaient fait preuve les acteurs économiques locaux (employeurs et syndicats de salariés) au lendemain des conflits de 1998 en mettant en place ce fameux dispositif de dialogue social. La population martiniquaise a fait à nouveau la preuve de sa capacité à pratiquer la concertation à travers les travaux menés dans le cadre des Etats Généraux après février 2009.
Il faut maintenant que les acteurs du monde politique prennent l’initiative d’un rapprochement constructif et prospectif avec les acteurs du monde économique afin de mettre en œuvre ensemble une vraie stratégie de sortie de crise. Faire preuve de cette maturité en se mettant ensemble et sans tabou au diapason de l’urgence économique c’est aller vers le gagnant/gagnant et non pas s’enfermer dans une posture de « coqs game » bien connus dans nos pitts. L’avenir de la Martinique – et celui de sa jeunesse en particulier – vaut bien ces efforts de concertation et cette recherche de consensus qui sont une condition sine qua non pour sortir de la crise qui affecte si gravement notre société. Contre le plus étroit, choisissons le plus large, pour pouvoir rassembler tout ce qui est épars.