Raphaël Confiant nous a adressé ce papier dans lequel il nous livre sa vision de la visite du chef de l'Etat Lybien en France. Décapant.
Qu’est-ce qu’on a pu se marrer pendant la visite du Bédouin de Tripoli dans la Ville-lumière ! D’abord, Sarko et ses compères ont voulu nous faire un remake du fameux film Prends l’oseille et tire-toi ! En bref, pomper les 15 milliards d’euros de contrats du Guide libyen et le renvoyer fissa dans son bled, avec sa tente, ses amazones et ses chameaux. File-nous l’oseille et casse-toi, bédouin ! que ça aurait dû s’appeler. Manque de pot, le Bédouin ne l’a pas entendu de cette oreille et s’est éternisé__5 jours, putain qu’est-ce que c’est long pour une visite de chef d’état !__tout en narguant la classe politique française, avec sa barbichette mal taillée comme par exprès, ses burnous et ses toges antiques, son énorme pin’s représentant l’Afrique fiché sur la poitrine et son extravagante limousine blanche.
Ah, sa tente plantée en plein dans les jardins de l’hôtel Marigny ! J’imagine que c’était pas prévu dans le scénario et que le bouillant et imprévisible colonel a obligé les Français à l’inscrire sur leur script au dernier moment. J’imagine les tronches épuisées des mecs chargés d’organiser sa visite. J’imagine leurs supplications : « Vous pouvez pas nous faire ça, cher Guide ! C’est un symbole qui risque d’irriter le peuple français. Il aura l’impression que tous les efforts de Charles Martel à Poitiers ont été vains. Vous comprenez, mon colonel ? ». Et le Bédouin, inflexible et rieur, de leur rétorquer : « Par Allah, je dormirai sous ma tente qu’il vente ou qu’il grêle, OK ? C’est moi qui paye, donc je veux rien savoir. Et puis qui me dit qu’y a pas des micros cachés dans vos suites pour milliardaires ? ». Et puis, au tout dernier moment, après les avoir laissé suer toutes les sueurs froides de leur corps : « Ben non, les gars, j’ai juste voulu vous faire peur. Ha-haha ! La tente, ça sera pour recevoir mes invités, tradition du désert oblige. »
Fallait voir la mine pour une fois pas faraude pour deux sous de l’homme Sarko lorsque Mouamar est descendu de sa caisse et a traversé d’un pas volontairement lent le gravier de l’Elysée ! Mais bon dieu de bon sang, amène-toi vite, Bédouin, qu’elle disait sa mine ! Pas la peine de t’éterniser sous les flashes, ça me fout mal à l’aise de te serrer interminablement la main sur le perron. Mais entre, bon dieu ! Et le Khadaf de se fendre la gueule derrière ses lunettes noires qui lui dissimulaient les yeux alors même qu’à Paris, on est au début de l’hiver et que la lumière du jour, c’est pas ça qui risque d’aveugler qui que ce soit. Et le soir, au moment de la signature des contrats, lorsque les deux chefs d’Etat se sont plantés derrière leurs ministres des affaires étrangères respectifs qui paraphaient les fameux contrats, c’était à mourir de rire ! Sarko qui n’en menait pas large, qui regardait droit devant lui dans le vide, qui avait un rictus au coin des lèvres et qui même consulta son Blackberry en douce, mais d’un geste nerveux. Pendant ce temps-là, le Bédouin, lui, était à moitié hilare et buvait du petit lait (de vache, pas de chamelle, évidemment ! On est tout de même en pays civilisé). Le doux crissement des stylos sur les feuilles donnaient quand même du baume au cœur à la partie française car comme un ministre l’a déclaré : « 15 milliards d’euros, ça correspond à 30.000 emplois pendant 10 ans ». C’est pas rien par ces temps de chômage endémique. Reste à espérer que les Bédouins des banlieues, pardon les Beurs, bénéficieront, au niveau de l’embauche, ne serait-ce que d’une toute partie de cette manne. Après tout, c’est leur frère de race qui a apporté le pognon salvateur, merde !
Le lendemain, le Guide s’est encore permis de retoucher le scénario en prononçant, à l’UNESCO, un discours très vif dans lequel il dénonça la manière avec laquelle les travailleurs immigrés étaient traités en France et en Europe. Vous avez pillé, massacré, colonisé l’Afrique pendant des siècles et maintenant vous vous croyez autorisés à nous donner des leçons de droits de l’homme, allez vous faire voir ! déclara-t-il en substance devant un parterre arabe et africain en délire. Il prenait là une petite revanche sur Sarko qui était venu l’autre jour le tancer à propos des 6 infirmières bulgares. Non mais il est gonflé, notre Bédouin ! Le folklore oriental, c’est bien joli, mais faut pas pousser, mec ! Comment tu peux mettre sur la même balance le sort effroyable de six nanas appartenant à la race supérieure et celui de plusieurs millions de bougnoules, bicots, ratons et autres négros ? Des bougnoules et des négros que l’on peut tamponner avec notre bagnole lorsqu’on est flic parce qu’ils roulent un peu trop vite à moto alors qu’un Gaulois, on l’aurait juste sifflé. Des bougnoules et des négros qui ont bien de la chance de ramasser nos poubelles, de décharger nos caisses et nos cartons, de grimper sur des échafaudages pour construire des immeubles, de cueillir nos pommes, poires, fraises et autres melons ou de descendre dans les mines pour extraire ce qui nous reste de charbon. Non mais t’es sacrément gonflé, le Bédouin !
Dans le scénario, qui aurait aussi bien pu s’appeler Le Bon, la brute et le truand, un big problem s’est posé dès le départ qui a dû filer des boutons aux gars de l’Elysée au niveau du casting. Si tout le monde était d’accord pour que le Bédouin joue le rôle de la brute (il a la gueule de l’emploi, n’est-ce pas ?), qui jouerait les rôles du Bon et du Truand ? Alors là, ça n’a pas raté ! Les Socialos ont aussitôt enfilé leurs tuniques de pseudo-vierges effarouchées et ont multiplié les déclarations indignées contre le « dictateur libyen », « le terroriste de Tripoli » ou encore le violeur des droits de l’homme. Le Bon, c’est nous et rien que nous qu’ils clamaient sur tous les toits, les petits-fils de Mitterrand ! Et le truand, c’est Sarko qui vend notre dignité nationale contre une poignée de dinars (eh oui, sont cons, ces socialos, au point de confondre le dinar qui vaut pas une pésette avec le dollar !). Pris de court, la bande à Sarko a d’abord fait profil bas, marmonnant que Kadhafi était certes un terroriste, mais un terroriste repenti. Dans les procès contre la mafia, en Italie, ne file-t-on un statut spécial aux mafiosi repentis ? Aux Etats-Unis, quand un criminel avoue d’emblée sa faute, ce qui fait gagner du temps et de l’argent aux autorités, ne lui refile-t-on pas un bonus équivalant à 30% de réduction sur sa peine ? Pourquoi ce qui est bon pour un mafioso rital ou un gangster yankee ne le serait-il pas pour un bédouin au couteau entre les dents ?
Mais rien n’y fit. Les choses menaçaient de virer au film-catastrophe pour la Droite. Alors, on fit intervenir des bonnes âmes de l’UMP qui, du bout des lèvres certes, dénoncèrent elles aussi la visite du « dictateur » libyen (entre parenthèses, Hu Jing-Tao, le mec qui gouverne d’une main de fer 1 milliard et demi de Chinois et colonise à tours de bras le Tibet, c’est un démocrate peut-être ?). Les ralliés à la Droite du genre Kouchner furent, comme à leur habitude, les plus lamentables. Bref, le bédouin ne fut pas autorisé à s’exprimer devant l’assemblée nationale française, privilège qui fut accordé à tous les dirigeants criminels de l’entité sioniste qui chassèrent le peuple palestinien de sa terre en 1948 et n’ont cessé depuis lors de le bombarder, massacrer, pilonner, cela dans l’indifférence générale, tant de la Droite que de la Gauche gauloises. Le clou du spectacle furent les propos indignés de la Rama Machin, sous-ministresse selon lesquels « notre pays » n’est pas « un paillasson sur lequel on vient essuyer ses bottes tachées de sang ». Sans blagues ! Et tes ex-compatriotes tirailleurs sénégalais qui furent mitraillés au sortir de la Deuxième Guerre Civile Européenne (1939-45) par leurs collègues militaires français parce qu’ils réclamaient la même solde qu’eux , cela au tristement fameux camp de Thiaroye ? Et tes ex-congénères immigrés qui sont obligés de se construire des cahutes en cartons ou de dormir sous des tentes (tiens, Khadafi n’a donc rien inventé !) qu’ils installent sur les grands boulevards parisiens pour réclamer un logement décent ? Et toute cette jeunesse « black » des banlieues laissée à l’abandon et qui part dans des dérives suicidaires à travers des guerres de bandes ? « Notre pays » que tu dis, laisse-moi rire, fillette ! Qu’Allah te pardonne !
Putain, trois jours qu’il est là, le bédouin ! Qu’est-ce que c’est long ! Interminable même. Plus que deux jours à tenir. On a les contrats dument signés en poche, on lui a fourgué notre « Rafale » qu’aucune armée du monde ne veut, on a obtenu des promesses d’autorisation de prospection de son gaz et tout. L’oseille, on l’a, alors casse-toi, mec, mer-de ! Mais non, le Khadaf, il continue à nous narguer, à nous casser les bonbons en allant se balader de son pas toujours aussi lent (on lui a appris que lenteur égale majesté ou quoi ?) au musée du Louvre. Et en plus, même pas cultivé avec ça ! Au lieu de demander à voir les toutes dernières découvertes archéologiques ramenées d’Egypte, il s’est arrêté devant des trucs ringards comme « La Vénus de Milo » ou La Joconde », des trucs que les beaufs de province viennent admirer une fois dans leur vie avec bobonne sans jamais se poser la question une seule seconde de savoir si ce sont les vraies ou si ce sont de simples copies. D’ailleurs, le Bédouin, on lui a filé des copies. On ne sait jamais, des fois qu’il serait tenté par une razzia avec toutes ces amazones et ces sbires armés jusqu’aux dents (200 en tout, non mais, vous vous rendez compte ! Pour qui il se prend, ce Mohammed, hein ?) qui l’accompagnent jour et nuit.
Plus qu’un jour. Le cinquième de cette interminable visite. Ouf ! Et les socialos qui continuent à sonner l’hallali alors que nous, on boit le calice jusqu’à la lie. On aurait bien aimé les y voir, eux ! S’ils étaient si honnêtes et vertueux qu’ils le disent pourquoi aucun d’entre eux ne s’est élevé contre les 15 milliards de contrats ? Si on comprend bien, ils veulent du pognon du Bédouin, mais ils veulent surtout pas lui dire merci. On les reconnaît bien là, ces socialos ! Hypocrites, raminagrobis, orfèvres de l’indignation vertueuse et du double langage. Cachez-moi ces contrats que je ne saurais voir ! Mais bon…Khadhafi s’est rendu au château de Versailles. C’est déjà ça. Il n’est plus à Paris à faire le beau dans ses toges à la con et à nous faire la leçon. Car nous, la repentance, jamais ! Qu’il le comprenne bien, ce blédard arrogant ! Nous, les Occidentaux, on exige qu’il s’excuse pour avoir fait exploser 600 passagers de deux avions de ligne et torturé 6 infirmières bulgares, mais nous, on refuse de s’excuser pour l’extermination de 40 millions d’Amérindiens, l’esclavage de 10 millions d’Africains et l’assassinat d’1 million d’Algériens pendant les « évènements d’Algérie » et d’autant de Vietnamiens pendant « l’agression communiste contre le régime démocratique de Saigon ». Niet ! Repentance pour lui et tous ceux de son acabit, zéro repentance pour nous, OK ? Tout juste nous excusons-nous pour la Shoah, mais c’est normal puisqu’après avoir pourri la vie des fils de Sion pendant 2.000 ans (de la destruction de Massada, en Palestine, par les Romains dans l’Antiquité à Dachau au XXe siècle), ils sont désormais nos potes. Mais ça, c’est une autre histoire…
Non, mais il nous fait chier, ce mec, le voilà qui s’attarde, comme par exprès, devant deux trucs qui rappellent qu’il est un dictateur et que nous on est en train de flatter un dictateur : le trône de Louis XIV et la salle où Napoléon a été couronné empereur. Non, mais, il aurait pas pu s’arrêter devant les tapisseries ou la vaisselle en porcelaine de Limoges des fois ? Ha la-la-la ! Et bien sûr, un journaleux à la con de TF1 de commenter les images en disant que « Khadafi a été fasciné par ces emblèmes du pouvoir absolu ». A la lie, on vous dit, qu’on le boira, ce calice ! Plus qu’une après-midi avant qu’il se casse, ce mec. Pourquoi le pape ne prie-t-il pas pour que le Bon Dieu fasse avancer plus vite les heures ? Pour une fois qu’il servirait à quelque chose, celui-là, au lieu de passer son temps à nous bassiner avec ses encycliques aux noms latins pompeux que personne ne lit plus. Et vlan ! Nouvel ajout au scénario ! Notre bédouin préféré exige de faire une chasse à courre. Rien que ça. Non mais il se croit au Moyen-âge ou quoi ? Si ça le botte de courser le week-end les hyènes et les chacals dans son désert de Cyrénaïque, nous, ce genre de trucs, on laisse ça aux nobliaux nostalgiques de l’époque d’avant la décapitation de Louis XVI ou aux Engliches de passage. Allez, qu’on lui lâche deux-trois renards et quatre-cinq chevreuils et qu’il les descende au fusil à lunette si c’est ça qui lui fait plaisir ! La nuit tombe vite en hiver. Va pas nous les casser trop longtemps de toutes façons.
Et ça continue pendant que monsieur est en train d’appuyer sur la gâchette : les socialos redoublent de férocité verbale, la Rama Machin se hausse encore du col si bien qu’on est obligé de lui remonter les bretelles, les éditorialistes de tous bords s’en donnent à cœur joie, pour une fois tous d’accord entre eux dans leur condamnation du dictateur et de sa venue dans la « Patrie des Droits de l’Homme ». Bref, on n’en finit pas d’en prendre plein la figure avec cette visite qui n’en finit pas ! Jusqu’à la lie, on vous dit. Et voilà qu’un foutu sondage tombe : 81% des Français ont d’accord avec la Rama Machin et son histoire de paillasson. Y compris ceux qui, en Algérie, lorsqu’ils étaient bidasses (ils ont la soixantaine ou la soixante-dizaine aujourd’hui) n’ont pas hésité une seconde à tirer les bicots comme des lapins, à violer les fatmas récalcitrantes, à torturer les suspects à la gègène, à incendier les mechtas où se cachaient des fellagas. Kadhafi est un salaud, mais eux, ils ont les mains propres. Je t’en foutrais, moi !
Ouf ! C’est fini. Les cinq jours se sont écoulés. On comprend maintenant quel dur labeur ça a dû être pour le Bon Dieu de créer le monde en sept jours. Le bédouin a fini par se casser en Espagne. Devraient se méfier, nos chers voisins espingouins, des fois que l’idée lui viendrait au bédouin de refaire le coup de ses ancêtres qui ont colonisé la péninsule ibérique pendant 7 siècles. Mais là, c’est plus notre affaire. Qu’ils se démerdent !
Allez, générique de fin, s’il vous plaît !…
Post-scriptum : je comprends un peu mieux mon grand-père lorsqu’il soutenait mordicus que cette histoire de Békés qui ont violé pendant des siècles les femmes noires esclaves, était une foutue couillonnade. « Faux ! » bramait-il lorsque le tafia lui était monté à la tête « Archi-faux ! Elles étaient parfaitement consentantes. Elles leurs servaient de paillasson ! ». T’as tout-à-faitement raison, l’ancêtre !
Raphaël Confiant