Bondamanjak

« Il m’appelait dans son bureau soi-disant pour traiter des dossiers et c’était en fait pour sortir son sexe en ma présence »

Le silence, la peur, et surtout la honte, qui elle, provoque la non libération de la parole, sont les garants de l’impunité de ces hommes.
Ces hommes vils qui abusent durablement des femmes notamment sur leur lieu de travail. Aussi, en #Martinique, comme ailleurs, le harcèlement, les agressions sexuelles et autres viols sont le signe d’un mal sociétal profond.
Il faut qu’un dialogue rare presque gênant s’installe pour s’entendre dire, au coeur d’une troublante confession : « Le harcèlement sexuel… j’ai connu plus jeune mais…je n’ai pas dénoncé ».

Le verbe est clair et glaçant. Dénoncer un coupable qui est, en sus, un politique en vue n’est pas envisageable. Ça non.
La peur pose vite ses valises et laisse supposer le pire : « Par crainte que mon contrat ne soit pas renouvelé. Je n’avais pas encore passé le concours ». Cette femme qui, aujourd’hui, brise cette insupportable chape de silence avait à l’époque tout juste une vingtaine d’années et débutait sa carrière professionnelle dans une collectivité importante de l’île.
Alors…pendant de longues années, elle se tait, elle se terre. Sans commentaire mais comment taire ?
Notre échange se poursuit. Elle parle…elle se vide…je ne dis pas grand chose. Je ponctue avec des virgules sonores, histoire de lui dire…libère toi, délivre toi. : «Eh oui entre ma parole et celle de l’élu en question, je sais que le choix aurait été vite fait et le scandale m’aurait suivi pour le reste de ma vie alors. Ces mecs ont le bon rôle.Tjip ».

Elle prend un air grave. Très grave : « Il m’appelait dans son bureau soit disant pour traiter des dossiers et c’était, en fait, pour sortir son sexe en ma présence ».
Les mots traduisent les maux. « J’évitais de me retrouver seule en sa présence. J’avais une vingtaine d’années, très mauvaise période. Ce n’était pas que du harcèlement, il voulait que j’aille avec lui dans les communes mais je déclinais ses offres. Je vous le dis car je voudrais juste qu’il ne fasse pas le coup à d’autres jeunes femmes ».
Je regarde cette femme, ces yeux qui cherchent dans sa mémoire et qui remontent à la surface comme un plongeur content de retrouver l’air libre : « Mais ce n’est pas tout. Il essayait de m’embrasser mais voyait bien que je n’étais pas d’accord et retentait le coup. C’est un obsédé ».
Elle me donne le nom de l’élu qui siège encore sur les bancs de la nouvelle Collectivité. Oui, hélas, il est encore là.
En échange je lui promets, bien malgré moi de me «taire». Le hic c’est que sur ce territoire de 75 km de long et de 33 de large, d’autres femmes ont connu pire.
Pire…sont en train de vivre le pire. Et c’est peu de dire pire.
Elles aussi ont le droit, voire le devoir de libérer la parole. Je dis ça je ne dis rien. A suivre.