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Japon : le point complet (mercredi 7H00)

Lors d’une conférence de presse du dimanche 13 mars à 19h30 (heure japonaise), le CNIC a expliqué que la pression à l’intérieur de l’enceinte de confinement a atteint 1,5 fois la pression maximale autorisée.

Dans la soirée du samedi 12 mars, les autorités ont autorisé le noyage du bâtiment réacteur avec de l’eau de mer borée afin de refroidir le cœur. Dimanche, la situation se serait stabilisée. Le bore absorbe les neutrons et est injecté pour éviter un accident de criticité (réaction nucléaire en chaîne explosive).

Pour le moment, il est fait mention de 4 employés de la centrale blessés lors de l’explosion et d’un mort. Au moins 21 personnes auraient été contaminées par les dégazages pendant qu’elles attendaient les secours. Dans un communiqué, TEPCO, l’exploitant, annonce qu’un salarié a reçu une dose de 106,3 mSv (soit plus de 5 fois la dose maximale admissible durant une année entière pour les travailleurs les plus exposés). Le nombre total de personnes contaminées pourrait atteindre les 160.

Mercredi 16 mars, TEPCo a annoncé qu’elle pense que 70% du combustible est endommagé suite à un début de fusion. (7:30)

Réacteur n°3

La situation est aussi devenue inquiétante dans le réacteur n°3 dimanche matin (heure japonaise). L’eau de refroidissement a aussi manqué. Le niveau d’eau aurait ensuite été rétabli. Ce réacteur est chargé en MOx, combustible contenant plus de plutonium que le combustible classique. Un nouveau chargement de Mox devait quitter prochainement la France pour ce réacteur. Lors d’une conférence de presse qui a eu lieu vers 17h30 heure japonaise dimanche 13 mars, l’autorité de sûreté a annoncé que de l’eau de mer a aussi été injectée dans ce réacteur et des gaz relargués. Elle n’exclue pas la présence de poches d’hydrogène pouvant entraîner une explosion comme pour le réacteur n°1.

De fait, deux explosions hydrogène ont aussi eu lieu dans le réacteur n°3, lundi 14 mars à 11h, heure locale. Il y aurait 11 blessés. L’enceinte de confinement n’aurait pas été endommagée.

D’après le Japan Times daté du 15 mars, dans la nuit de dimanche à lundi (à confirmer) l’injection d’eau de mer dans le réacteur n°3 a cessé entre 1h et 3h20 du fait du manque d’eau dans la citerne. Cela a entraîné un échauffement, une montée en pression et une augmentation du rayonnement. TEPCo a envisagé de relâcher de la vapeur radioactive pour faire baisser la pression et d’évacuer ses employés. Mais la pression a finalement baissé et les opérations ont repris.

Les autorités japonaises ont déclaré dimanche, en début d’après midi (heure japonaise), qu’elles considéraient comme fort probable que la fusion du coeur ait eu lieu dans les réacteurs n°1 et 3 de la centrale de Fukushima dai-ichi. Même si elles ne peuvent pas le vérifier, elles travaillent actuellement avec cette hypothèse. Mardi, la situation semble stabilisée dans ces deux réacteurs.

Depuis mercredi 16 mars 10h (heure locale) de la fumée blanche est visible au dessus du réacteur n°3. Les niveaux de radioactivité ont augmenté soudainement jusqu’à 6,4 millisieverts/h et fluctuent actuellement autour de la valeur moitié. Il se pourrait que ce soit dû à de l’eau dans le bassin de supression qui se serait évaporée. Cette eau est radioactive.

Il est possible que l’enceinte de confinement du réacteur n°3 soit aussi endommagée. (7:00)

Réacteur n°2

Dimanche soir (heure japonaise), des préparatifs sont en cours pour injecter de l’eau de mer dans le réacteur n°2 de la centrale de Fukushima dai-ichi. Lundi 14 mars après midi le porte-parole du gouvernement a annoncé qu’il n’y avait plus aucun système de refroidissement fonctionnel dans le réacteur n°2 et que la pression monte dans l’enceinte. Le toit du bâtiment réacteur a été percé lors de l’explosion du bâtiment voisin, permettant d’éviter l’accumulation d’hydrogène et une explosion. Les barres de combustible dans ce réacteur seraient complètement sorties de l’eau. TEPCo se veut rassurante en disant qu’ils ajoutent de l’eau dans le réacteur, mais ne peut pas dénier que le coeur ait commencé à fondre. On ne sait pas exactement combien de temps les barres sont restées hors de l’eau ni la température qu’elles ont atteinte. Il est fait mention de 2 heures et demie. Le seul employé qui s’occupe de la pompe ne se serait pas rendu compte qu’elle manquait du fuel. Un peu plus tard, les autorités ont annoncé que l’eau de mer a atteint un niveau de 2 mètres dans le coeur. Les barres font 4 m. Mais la situation dans le réacteur n°2 s’est aggravée dans la nuit de lundi à mardi. Le niveau de l’eau a de nouveau baissé. Des chiffres de 3 millisievert par heure ont été annoncés à la télévision japonaise durant la nuit de lundi à mardi (heure locale). La fusion du coeur de réacteur est très probable ! Les opérations de pompage ont repris mardi matin très tôt. A 3h, heure locale, la pression a baissé, mais TEPCo ne peut pas confirmer que les barres de combustible sont bien noyées. Des valves pour la vapeur se seraient fermées sans que l’on comprenne pourquoi. Il se peut que l’eau fuit de l’enceinte de confinement. Bref, l’eau ne semble pas monter aussi vite qu’attendu.

Mardi matin, le mot « Tchernobyl » commence à apparaître dans les déclarations officielles, pour dire que c’est moins grave.

Mardi matin à 6h10, une nouvelle explosion a été entendue et il est probable que l’enceinte de confinement du réacteur n°2 soit endommagée. La « chambre de suppression » qui sert réguler la pression si la vapeur ne pas pas être conduite correctement à la turbine, semble endommagée. La vapeur est alors dirigée vers la chambre de suppression qui est refroidie pour condenser la vapeur. Selon les autorités, la situation demeure incertaine dans ce réacteur.

Aucune nouvelle évacuation n’était prévue mardi matin, bien qu’il resterait 354 personnes à évacuer dans le rayon des 20 km. Ce sont par exemple des personnes hospitalisées. L’évacuation a finalement eu lieu pendant la journée de mardi. Deux personnes hospitalisées sont mortes pendant l’évacuation. (10:00)

Mardi, il a été annoncé que l’enceinte de confinement n’était plus étanche.

Mardi 15 mars, l’ACRO a reçu un tableau de données de mesures sur le site de la centrale de Fukushima dai-ichi qui montre une élévation d’un facteur 10 du rayonnement neutron, ce qui est un très mauvais signe. En effet, c’est un signe de démarrage de réactions nucléaires. Si c’est dans la piscine du réacteur numéro 4 qui n’est pas confinée, on peut atteindre le niveau Tchernobyl.

Mercredi dans la journée, TEPCo a reconnu que la possibilité du redémarrage d’une réaction en chaîne n’était pas à exclure. Elle pense que 33% du combustible est endommagé suite à un début de fusion. (7:30)

La Corée du Sud a annoncé mercredi qu’elle envoyait 52,6 tonnes d’acide borique au Japon sur son stock de 309 tonnes. Le bore sert à empêcher ou arrêter les réactions en chaîne. (9:00)

Réacteur n°4

Ce réacteur était arrêté depuis novembre 2010.

Le réacteur n°4 était arrêté avant le tremblement de terre de vendredi 11 mars. L’eau de refroidissement du bassin avec le combustible usé s’est évaporée. Le combustible s’est échauffé, il y a eu une explosion d’hydrogène mardi matin à 9h40 (heure locale), suivi d’un incendie. Le niveau de radioactivité à proximité des réacteurs a atteint les 400 millisieverts. L’incendie a finalement été maîtrisé et les niveaux de radioaction ont baissé.

Des niveaux de quelques microsieverts par heure ont été détectés à des dizaines de kilomètres de l’incendie. Les vents étaient dirigés vers les terres et le temps était à la pluie et neige. Un niveau de radioactivité légèrement supérieur à la normale a également été relevé mardi à la mi-journée à Tokyo ainsi qu’en extrême-orient russe.

Toutes les personnes (sauveteurs…) ont été évacuées dans un rayon de 20 km. Les personnes confinées dans un rayon de 30 km.

Les consignes de protection et de confinement tournent en boucle sur la télévision japonaise. La surveillance des réacteurs n° 5 et 6 est renforcée : le refroidissement ne semble pas fonctionner correctement. A la différence du réacteur n°4 où tout le chargement était dans la piscine d’entreposage, il n’y en a qu’un tiers dans les piscines des 2 autres réacteurs arrêtés. La température y est plus élevée que la normale.

Il semblerait que de nombreuses personnes ont commencé à s’éloigner le plus loin possible de la centrale de Fukushima dai-ichi par tous les moyens de transports disponibles.

Mardi 15, vers 22h (heure locale), il a été annoncé que le niveau de radioactivité dans la salle de contrôle du réacteur n°4 est devenu trop élevé pour que les ingénieurs puissent effectuer un travail normal. Ils ne peuvent pas rester longtemps et doivent effectuer des va-et-vient. Cela menacerait les opérations de pompage dans la piscine de combustibles usés. Tepco a évacué 750 employés du site de Fukushima, où il ne reste que 50 ingénieurs et techniciens.

L’exploitant TEPCo semble complètement dépourvu face à la situation. Ils réfléchissent à utiliser un hélicoptère pour injecter de l’eau dans la piscine (et contrôler l’éventuelle réaction nucléaire ?). Mercredi 16 mars matin, TEPCo a annoncé avoir abandonné cette idée trop compliquée. En effet, un hélicoptère ne peut transporter qu’une petite quantité d’eau à la fois.

La température à l’intérieur de la piscine est inconnue. Lundi, elle était de 84°C, plus du double de la normale. Le niveau d’eau a aussi diminué. Il se peut qu’il n’y ait plus d’eau. (7:00)

TEPCo est sans nouvelles de deux techniciens après l’explosion. IIs se trouvaient dans le secteur de la turbine du réacteur n°4.

Mercredi vers 6h00, heure locale, un incendie s’est à nouveau déclaré dans la piscine de combustibles usés. Une demie-heure plus tard, le feu semble éteint. Mais ce n’est pas sûr. (7:00)

Vers 17h, un hélicoptère de l’armée a décollé pour arroser la piscine et mesurer la radioactivité. Il semblerait qu’il ait fait demi-tour à cause du niveau trop élevé de radoactivité (10:00).

Autres informations

Mardi 15 mars l’ASN, a estimé que l’accident de la centrale nucléaire japonaise relève désormais du niveau 6 sur une échelle de 7. Elle a été suivie par son homologue américaine. 7 correspond à Tchernobyl. Ce niveau était évalué à 4 par les autorités japonaises.

Suite aux évènements du mardi 15 mars, le gouvernement japonais a installé une cellule de crise dans les locaux mêmes de TEPCo afin de pouvoir être bien informé. Elle est présidée par le premier ministre en personne !
Par ailleurs, le gouvernement a ordonné à toutes les préfectures de rendre publiques les données de mesure de la radioactivité. De fait, de nombreuses données sont apparues sur Internet. Nous donnons quelques liens en anglais ci-dessous. Il y a en a beaucoup plus en Japonais.

Mercredi, des traces de césium et d’iode ont été découvertes dans le réseau d’approvisionnement en eau de Fukushima. (10h)

Attention, les chiffres sont donnés en microsieverts par heure. Pour rassurer, les autorités japonaises donnent les doses reçues lors de certains actes médicaux à titre de comparaison. Mais ces doses sont données en microsieverts. Ce n’est donc pas directement comparable.

Les autorités commencent aussi à manquer d’essence dans la région sinistrée et demandent à la population de limiter les pleins d’essence. La priorité doit être donnée aux secours.

Une élévation de la radioactivité ambiante a été détectée dimanche matin à la centrale d’Onagawa, située à une centaine de kilomètres au Nord de celles de Fukushima. La compagnie d’électricité du Tohoku, l’exploitant, mentionne des niveaux ayant atteint une vingtaine de microsieverts par heure dans une balise de surveillance. Il est fort probable que la radioactivité viennent de Fukushima. La situation est redevenue « normale » dans la soirée.

Dans une note publiée le dimanche 13 mars à 19h, l’IRSN « craint que des rejets très importants se soient produits en même temps que l’explosion ». La télévision japonaise a diffusé des images de radiamètres saturant dans une mairie proche du réacteur qui a explosé. Le discours officiel est toujours rassurant. On ne voit aucune image de personne en shadok ou se protégeant des radiations dans les médias japonais, contrairement aux médias étrangers.

Dans la soirée de dimanche 13 mars, on a appris qu’un réacteur de Tokaï-mura avait aussi perdu son système de refroidissement. Le système de secours serait actif.

Le 15 mars au soir le bilan est : 3 373 morts, 7 558 disparus, 1 990 blessés et 544 717 déplacés.

Les autorités japonaises ont présenté dimanche soir un plan drastique de gestion de la pénurie d’électricité, annonçant des coupures programmées par tranche de trois heures à partir de lundi et jusqu’en avril. Une grande partie des annonces télévisées actuelles concerne ces coupures.

L’alerte au tsunami a été levée lundi 14 mars.

Nous essayerons de compléter les informations contenues dans cette page en fonction de l’évolution des évènements.

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Il y a deux centrales de Fukushima : Fukushima dai-ichi (n°1) avec 6 réacteurs à eau bouillante et Fukushima dai-ni (n°2) avec 4 réacteurs. Les réacteur n°4 à 6 de Fukushima dai-ichi étaient déjà arrêtés avant le tremblement de terre. Les deux centrales sont séparées de 12 km et appartiennent toutes les deux à la compagnie d’électricité de Tokyo (TEPCo en anglais). La centrale d’Onagawa regroupe 3 réacteurs à eau bouillante et est exploitée par la compagnie d’électricité du Tohoku.

Le New York Times propose une animation très claire montrant la structure du réacteur de Fukushima dai-ichi.

Les conditions météo sur place peuvent être consultées en français ici.

Comme prévu, ces centrales se sont arrêtées automatiquement lors du séisme. Mais, même arrêté, le combustible de la centrale dégage de la chaleur. Il faut de l’eau, des pompes et donc de l’électricité pour refroidir le coeur. Les générateurs de secours n’ayant pas fonctionné, la température et donc la pression ont augmenté avec un risque d’endommager l’enceinte de confinement.

Une trop forte augmentation de la température peut faire fondre la gaine des pastilles de combustible qui retient les produits de fission radioactifs. La présence de césium 137 relevée dans les rejets gazeux laisse penser que le coeur du ou des réacteurs a commencé à fondre.

Les niveaux de radiation mesurés par plusieurs balises autour des centrales de Fukushima sont visibles ici. Cependant, les données semblent s’arrêter au 12 mars. La courbe bleue continue indique le niveau de radiation en nGy/h. Le graphe du haut est sur 24h, celui du milieu sur une semaine et celui du bas sur 1 mois. La courbe en pointillés correspond au maximum enregistré par le passé.
Pour changer de balise, il faut cliquer sur la carte, mais nombreuses semblent inopérantes.

D’autres données sont disponibles en anglais en ligne :
– à Wako dans la banlieue de Tokyo, laboratoire RIKEN
– au niveau de la centrale de Monju dans la préfecture de Fukui
– en différents points du pays

Il y en a beaucoup plus en japonais. Nous consulter.

Une des raisons des problèmes d’approvisionnement électrique actuels vient du fait qu’une partie du Japon (Kansai) utilise du 60 Hz alors qu’une autre partie (Kanto) utilise du 50 Hz. Il n’y a que trois transformateurs entre les deux régions et il est donc difficile de transférer de l’électricité d’une partie à l’autre. De plus, seuls 3 réacteurs sur 7 de la centrale de Kashiwazaki-Kariwa aussi exploitée par TEPCo et endommagée par le tremblement de terre de 2007 fonctionnent.
A Three Miles Island, il a fallu 10 ans pour pouvoir inspecter le coeur et comprendre ce qui s’est passé.

Articles de l’ACRO en ligne sur des évènements passés au Japon :
A propos des falsifications de TEPCo dans le passé
A propos de l’accident de Tokai-mura le 30 septembre 1999

mercredi 16 mars 2011, 10h30, heure française

Informations : Association pour le Contrôle de la Radioactivité de l’Ouest