Hier soir, l'Agora de l'hôtel de Région a résonné de bèlè et de ti-bwa. Mondésir, Casérius, Quatre-Vent ont rendu hommage à Joseph "Khokho" René-Corail. Les personnes présentes ont repris en choeur les refrains de ces créatons originales.
Auparavant, Alfred Marie-Jeanne avait ouvert la cérémonie avec le charisme qu'on lui connait. Le texte de la préface de l'ouvrage dirigé par Renée-Paule Yung-Hing.
"Qui ne connaissait René-Corail dit Khokho ? Nous nous étions croisés à maintes reprises lors de meetings, singulièrement en 1974, lorsque, militant de «La parole au peuple», je jetais les bases d’une organisation politique qui deviendrait, par la suite, le MIM, Mouvement indépendantiste martiniquais.
En plusieurs circonstances, parce que nos stratégies divergeaient, il eut l’occasion de m’apostropher en des termes que seule notre âme martiniquaise peut comprendre, accepter.
À l’époque, je n’avais pas encore pris toute la mesure de son pouvoir créateur, de son génie esthétique. Mais je pressentais qu’il y avait là quelque chose de profond, de bouillonnant.
Nos routes s’étant séparées, je demeurais cependant attentif à ses recherches. Ses créations m’interpelaient de plus en plus. La passion qu’il déployait dans son activité artistique à promouvoir notre pays m’impressionnait.
Mais je restais insatisfait de la place qu’on lui accordait, lui qui a été toute sa vie exploité. En mon for intérieur, je souhaitais que les Martiniquais redécouvrent cette part d’eux-mêmes qui menaçait de s’estomper, et aussi cette insubordination créatrice que Khokho symbolisait avec tant de ferveur.
J’ai donc voulu cet ouvrage. Je l’ai voulu parce que René-Corail est important pour nous, comme il est important pour l’art en général. Pour celui qui a incarné, à un tel degré, l’insoumission, la résistance, qui les a illustrées avec tant d’éclat, qui a bousculé l’art en Martinique, pour ceux qui croient en ce pays, en son avenir, et pour la Beauté, ce volume m’a paru nécessaire.
Enfin, c’est pour moi l’occasion de rendre hommage à une amitié, ô combien tumultueuse !
J’y songeais depuis si longtemps !"
Alfred Marie-Jeanne, Président du conseil régional de Martinique