Par Sandrine Saint-Aimé
– L’épandage aérien est un débat qui est de plus en plus d’actualité pour deux raisons :
1) la maladie de la cercosporiose noire (pour le traitement de laquelle le Banole est utilisé en tant qu’adjuvant) est apparue sur un bananier pour la première fois en Martinique en Septembre 2010 ;
2) l’épandage aérien a été interdit (avec des possibilités de dérogations en principe exceptionnelles) par la loi Grenelle 2 du 13 Juillet 2010.
Petit rappel :
La Directive européenne du 21 Octobre 2009 (n° 2009/128/CE), interdit l’épandage de pesticides par voie aérienne (avion ou hélicoptère).
Elle précise que « la pulvérisation aérienne de pesticides est susceptible d’avoir des effets néfastes importants sur la santé humaine et l’environnement, à cause notamment de la dérive des produit pulvérisés ».
La loi Grenelle 2 du 13 Juillet 2010 (article 103) interdit la pulvérisation de pesticides par voie aérienne, « sauf dans des conditions strictement définies par l’autorité administrative pour une durée limitée lorsqu’un danger menaçant les végétaux, les animaux ou la santé publique ne peut être maîtrisé par d’autres moyens ou si ce type d’épandage présente des avantages manifestes pour la santé et l’environnement par rapport à une application terrestre (…) ».
L’arrêté interministériel du 31 Mai 2011, qui découle de la loi Grenelle 2, paru au Journal officiel du 8 Juin 2011 (JORF n°0132 du 8 Juin 2011 page 9744 – texte n° 28), fixe les nouvelles règles applicables à l’épandage aérien des produits phytopharmaceutiques et stipule qu’il est interdit de réaliser des épandages aériens.
Toutefois, des dérogations sur maïs, riz, vigne et banane sont possibles.
Et c’est ainsi que, le 8 Décembre 2011, le Préfet de Martinique a signé le premier arrêté portant dérogation à l’interdiction.
– Suite au courrier adressé au Préfet de Région par Serge LETCHIMY, Président du Conseil régional de Martinique, il convient de préciser que les élus du groupe « Ensemble pour une Martinique Nouvelle » de la Région Martinique ont, par deux fois, acquiescé à la poursuite de l’épandage par voie aérienne.
Seuls les élus du groupe des Patriotes Martiniquais et Sympathisants se sont opposés à l’épandage aérien.
Chantal MAIGNAN lors d’une interview à la télévision a même déclaré que c’est grâce à elle que la Région Martinique a donné un avis favorable à la poursuite de l’épandage aérien.
D’ailleurs, dans sa réponse à la question N° 3738 du 14 Décembre 2011 d’Alfred Marie-Jeanne, le Ministre de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire s’est appuyé sur cet avis favorable des élus de la majorité à la Région, pour refuser l’interdiction de l’épandage aérien : » Enfin, ce traitement a reçu non seulement l’accord du préfet mais aussi celui du conseil régional, auquel j’ai demandé un avis préalable avant de donner cette autorisation. « .
Voir au lien suivant la question et la réponse : http://questions.assemblee-nationale.fr/q13/13-3738QG.htm
– Le 10 Octobre 2012, à l’occasion des débats parlementaires sur la loi sur la vie chère, le député Serge LETCHIMY s’est opposé à l’amendement n° 14 présenté par son collègue François-Michel LAMBERT visant à interdire formellement l’épandage aérien « pour éviter une autre catastrophe sanitaire cumulée à celle du chlordécone ».
– Il convient en outre de noter que dans son courrier adressé au Préfet de Martinique, l’actuel Président de Région n’a pas véritablement exprimé un avis défavorable contre l’épandage aérien, mais a simplement indiqué que « l’épandage par voie aérienne, pose aussi problème ». Dire que l’épandage aérien « pose problème » sans véritable argumentation d’opposition à l’appui ni positionnement politique clair, c’est une formule très elliptique qui permet de ménager les susceptibilités du lobby bananier…
– Par ailleurs, le Conseil régional de Martinique ne s’est, à aucun moment, réuni en séance plénière pour donner un avis sur la troisième demande de dérogation.
La Commission ad hoc mise en place n’a quant à elle, jamais présenté de conclusions définitives.
Pour rappel, cette commission, selon la motion du 1er Décembre 2011, devait :
« (…) dans un délai maximum de trois mois, proposer des solutions alternatives qui préservent les intérêts économiques environnementaux et de santé publique de la Martinique.
Ces solutions alternatives visant à l’arrêt définitif de l’épandage aérien en Martinique, doivent être mises en œuvre dans un délai maximum de six mois. »
Dans le France Antilles N° 13 859 du Vendredi 8 Mars 2013 page 8, il est notamment indiqué dans LE DOSSIER de France Antilles intitulé « Les élus serpentent entre les bananiers » :
« Et la commission, où en est-elle ? Depuis la deuxième dérogation, elle n’a jamais reconvoqué personne. Par ailleurs, aucun rapport définitif n’a jamais été transmis, avec des conclusions politiques de ce nom. Il faut dire qu’en « off », les avis divergent au niveau des élus. ».
A croire que cette commission a été mise en place uniquement pour jeter de la poudre de perlimpinpin aux yeux des Martiniquais…
– Enfin, il faut préciser également qu’aucun des élus du groupe majoritaire à la Région « Ensemble pour une Martinique Nouvelle » n’est venu manifester contre l’épandage aérien le 23 Février 2013.
– En réalité, de manière très opportuniste et démagogique, Serge LETCHIMY, sentant le vent tourner, essaye de réécrire l’histoire et de faire croire que sa majorité au Conseil régional de Martinique a voté contre l’épandage aérien, alors qu’il n’en est rien !