Sans commentaire mais comment taire ?
Cet entretien avec Raphaël Confiant, « La Créolité aujourd’hui » a été réalisé à Schœlcher, Martinique, le 17 janvier 2008 par Hanétha Vété-Congolo. Il est publié pour la première fois sur Île en île.
« Il nous fallait sortir des enfermements identitaires qui ont marqués ce pays [la Martinique] et les pays environnant pendant des siècles. Quels sont ces enfermements identitaires ? D’abord, le monde des blancs créoles qui s’est enfermé dans ce qu’on pourrait appeler sa blanchitude et qui, pendant des siècles, a opprimé les autres groupes en imposant une idéologie blanco-centrée.
[…] Donc, il fallait à un moment donné proposer une conception identitaire qui réconcilie tout le monde. C’était surtout un appel à la classe dominante – à la classe béké, blanche créole – pour lui dire de sortir de son enfermement. C’est une main tendue pour lui dire que nous la reconnaissons comme martiniquaise, qu’elle partage la même langue et la même culture créole que nous […]. Je disais que ma première déception était le monde politique. Mais ma deuxième plus grosse déception, c’est le monde des blancs créoles.
Nous leur avons tendu la main. Mais en vain. Nous avons fait une dizaine de séances de discussions dans l’entreprise d’un blanc créole qui dirige aujourd’hui une association qui s’appelle Tous Créoles, Monsieur de Jaham.
Bernabé, Relouzat, Chamoiseau et moi-même, nous sommes allés pendant un an, une fois par mois, discuter avec ces békés. Ils étaient une dizaine, nous aussi une dizaine, et nous discutions. Et au bout d’un an, nous nous sommes rendu compte qu’ils n’avaient que faire de la Créolité et qu’en fait, ils voulaient nous mener en bateau. Ils avaient toujours l’idéologie suprématiste de dominer ceux qui ne sont pas békés. Donc, nous avons rompus nos relations ».