La chanteuse, que l’on devrait revoir sur scène le 13 septembre au Zénith, participe à «Concerning Violence», documentaire inspiré des «Damnés de la terre».
Göran Hugo #Olsson, réalisateur suédois de Göteborg, présente dans plusieurs festivals Concerning #Violence, Nine Scenes From the Anti-Imperialistic Self-Defense, un documentaire sur le colonialisme et ses effets dévastateurs. Son film, nourri d’images d’archives, est inspiré de l’ouvrage les Damnés de la terre, du martiniquais Frantz Fanon, écrit après le putsch des généraux et la répression sanglante du 17 octobre 1961, à Paris, opposant la police française aux manifestants algériens.
Le réalisateur a fait appel à Lauryn #Hill, 39 ans, pour être la voix off de son film.
Dans une interview accordée au site du magazine Dazed, il explique pourquoi il a tenu à ce que la chanteuse américaine, en pleine tentative de retour après de longues années d’errance, prête sa voix à son film: «Je savais, par des amis communs, que Lauryn Hill était une grande lectrice de Fanon, explique-t-il. Je lui ai envoyé une lettre accompagnée d’images alors qu’elle était en prison pour des problèmes fiscaux. Elle m’a répondu immédiatement: « C’est étrange, je suis ici en prison et je suis en train de lire ce livre. Je ne vais pas seulement faire la voix off, je vais aussi écrire la musique. » Comme elle n’a pas été libérée avant la fin du mois d’octobre, elle n’a pas eu le temps de faire la musique du documentaire. Mais deux jours après sa sortie de prison, elle était au studio pour enregistrer la narration.»
Göran Olsson avait réalisé The Black Power Mixtape, en 2011, sur l’évolution du mouvement Black Power aux Etats-Unis entre 1967 et 1975. Il s’agissait déjà d’un film d’archives. Concerning Violence, présenté au dernier festival de Sundance et à la Berlinale en février, fait appel à des images d’archives empruntées à la télévision suédoise. On revoit le mouvement de libération en Angola ou au Mozanbique, la lutte pour l’indépendance en Tanzanie, des images de missionnaires suédois mêlées à des scènes de la vie quotidienne tournées en Afrique entre 1966 et 1984.
Olsson, qui incruste des extraits du livre de Frantz #Fanon, explique: «Le texte [de Fanon, NDLR] est très révélateur de ce qui se passe aujourd’hui. Il ne s’agit pas des mêmes pays ni de leurs armées, mais il s’agit de multinationales qui exploitent les matières premières. En Occident, nous vivons dans un mensonge total: nous n’essayons jamais de comprendre où sont fabriqués nos téléphones bon marché ou nos tee-shirts. J’ai fait un film comme un Européen du Nord à l’attention, principalement, d’autres Européens du Nord et pour tenter de comprendre ce mécanisme.» Olsson constate que, plus de cinquante ans après la décolonisation, l’Afrique doit toujours faire face aux mêmes effets néfastes et à la violence que Fanon dénonçait alors: «Nous avons des règles sur le commerce: par exemple, je pense qu’il est très important qu’une société minière suédoise puisse s’établir au Congo si elle le souhaite […]. Le libre-échange des biens et des services est primordial. Mais, dans les faits, personne ne peut dépasser les rives de la Méditerranée pour aller du Sud vers le Nord, y vivre et y travailler. Si nous sommes dans le libre marché, on doit pouvoir implanter des mines au Congo et les Congolais doivent pouvoir, eux aussi, se rendre à Stockholm et y ouvrir une épicerie.»