Par Maurice Laouchez
Pendant de longues années, le développement durable n’a concerné que le principe selon lequel nous devons laisser à nos successeurs une planète aussi saine que possible, avec des techniques de protection du vivant bien élaborées.
Au sommet de RIO DE JANEIRO, en 1992, il a été admis cette évidence que la protection du vivant ne pouvait pas suffire à l’équilibre d’une société et au progrès du monde.
Devant la gravité des faits de pauvreté, il fallait qu’une activité économique soutenue permette de satisfaire les besoins matériels criants de milliards d’êtres humains. D’où un deuxième impératif pour un développement durable, à savoir la croissance économique.
Mais l’homme ne vit pas seulement de pain. Il n’accepte plus que d’excessives inégalités président au partage des richesses. Cette exigence de justice a pris la forme d’un troisième impératif, la cohésion sociale, qui désigne l’équilibre à rechercher entre ceux qui possèdent plus qu’il ne leur en faut pour vivre, et ceux qui perdent leur vie à travailler ou à chômer.
Vingt ans après le sommet de RIO, il faut approfondir notre réflexion, en tirant tout simplement les leçons de l’évolution des 196 pays représentés à l’ONU. Plus que toutes les théories, davantage que toutes les idéologies, les faits, toujours les faits, doivent être scrutés et compris.
Que constate-t-on, en interrogeant les centaines d’expériences menées depuis, en fait les presque 70 années qui nous séparent de la fin de la deuxième guerre mondiale?
On constate qu’il manque aux trois premières conditions dégagées à RIO, deux autres facteurs sine qua non pour qu’une société connaisse une évolution apaisée, et un véritable progrès.
Ces deux facteurs sont la culture et la bonne gouvernance.
La culture, c’est en fait ce qui distingue décidément l’homme de l’animal. C’est la connaissance, au sens le plus large, c’est la compréhension de son passé et de celui des autres, c’est l’appréciation juste du point présent dans le curseur de l’humanité, c’est l’ensemble des acquis qui permettent à chacun, là où le hasard l’a fait naître, comme il l’a fait naître, d’être, dirai-je familièrement, bien dans ses baskets.
Un pays où l’accès à la culture, à l’éducation, à la formation n’est pas bien organisé, ne peut pas connaître une évolution paisible, un développement durable, car l’individu sans culture ne peut pas être épanoui, il ne comprend pas le monde, et ne se comprend pas dans le monde.
Le dernier facteur, c’est ce qu’il est convenu d’appeler la gouvernance. Qu’est-ce-qu’on appelle gouvernance? C’est l’ensemble des institutions auxquelles chaque individu délègue une partie de sa liberté, une partie de son argent pour organiser mieux qu’il ne pourrait le faire lui-même le bien-vivre ensemble. Il s’agit de l’Etat, des collectivités locales, du système monétaire, tels que ces entités sont structurées, et telles qu’elles fonctionnent au quotidien. Le citoyen est en droit d’exiger le meilleur rapport qualité/prix de tout le système, et, commencement de tout, une transparence maximale. C’est de son argent, de sa sécurité et de sa liberté qu’il s’agit.
On le voit, le progrès durable d’une société ne saurait sérieusement se réduire à la protection de l’environnement. Quatre autres facteurs essentiels doivent également être pris en compte: la croissance économique, la cohésion sociale, la culture, et une bonne gouvernance pour optimiser l’ensemble.