Par l’anthropologue Francis Affergan.
Les souvenirs sont frais et vivants. Et pourtant nous sommes en 1975, au lycée Schoelcher de Fort-de-France en classe de philosophie, classe dans laquelle j’ai eu l’honneur d’enseigner cette noble discipline. Et Alex Ursulet se trouvait là, élève au fond de la classe toujours étonné de mes propos, en éveil, l’œil interrogateur, mutin et espiègle.
Puis, plus de quarante plus tard, par le plus grand des hasards objectifs, je le revois à Paris. Il est un avocat pénaliste célèbre, par le courage qu’il a toujours affiché à défendre « l’indéfendable », comme il dit.
Puis j’apprends l’affaire par la presse et je n’en crois pas mes yeux. Je ne peux me mêler du contenu de la procédure, ne la connaissant pas dans le détail. Mais je peux témoigner au plan personnel. Comment se fait-il qu’il ait pu commettre une telle forfaiture, lui qui a passé sa vie d’avocat à s’interroger sur les relations entre la morale et le droit ? Lui qui a tant œuvré à l’élaboration d’une doctrine de la peine ? Lui qui est si fier d’appartenir à ce noble corps des avocats pénalistes ?
A moins qu’il y ait autre chose qui se dissimule derrière cet étrange, brutal et incompréhensible jugement.
Cependant je n’ose imaginer qu’on ait pu sacrifier la carrière de quelqu’un sur l’autel d’une cause à défendre, fût-elle celle d’une solidarité quelconque.
Quoi qu’il en soit, son engagement pour des idées, sa générosité empathique, son goût pour le dialogue et sa propension à ne jamais se laisser aller à une quelconque agressivité me conduisent à parier soit qu’il s’agit d’une tragique erreur, soit que nous nous trouvons devant une manipulation tellement bien montée que la réalité censée être révélée apparaît aujourd’hui comme une construction perfide et cynique destinée à faire chuter quelqu’un.
La question demeure : pourquoi un tel acharnement?
En tout état de cause, mon total soutien lui est entièrement acquis.
Francis AFFERGAN