Par Frédérique URSULE et Fred GERMAIN avocats en #Martinique.
Le temps de l’avocat nanti est révolu depuis belles lurettes.
Au temps passé sur un dossier, les honoraires de l’avocat sont en réalité bien inférieurs au SMIC horaire (et encore quand l’avocat est payé !) car faut il savoir qu’au regard du serment prêté par l’avocat, dont l’un des cinq piliers est l’Humanité, nous sommes la seule profession acceptant de nous dévouer une journée entière, voire des soirées, des samedis, des dimanches et des jours fériés pour des causes non payées (consultations gratuites, aide juridictionnelle qui est une indemnisation symbolique et non une rémunération).
En ces temps, l’aide juridictionnelle est versée à l’avocat après un long parcours administratif, 6 mois quand ce n’est pas 18 mois après le terme de son dossier, ce qui entraîne la paupérisation de bon nombre de confrères, notamment des jeunes venant de s’installer.
Alors que la Justice fait partie des pouvoirs régaliens de l’Etat et devrait être financée par nos Impôts, ne voilà t il pas que le gouvernement veut créer une contribution volontaire obligatoire (c’est bien la désignation) sur le chiffre d’affaires des avocats afin de financer l’Aide Juridictionnelle. Rappelons que le budget consacré par l’Etat Français à l’Aide Juridictionnelle pour l’ensemble de la population est le même que celui consacré par le Québec pour 10 fois moins d’habitants. Ce sont donc les avocats déjà superbement taxés qui vont financer leurs propres revenus au péril de leurs cabinets et des emplois y attachés pour suppléer les carences de l’Etat.
Une telle décision du Gouvernement actuel va dans le droit fil de la mercantilisation de la Justice que nous dénonçons.
En effet, une série de mesures gages du prétendu redressement de la France auprès de Bruxelles sont prises de manière hâtive par le Ministère de l’Economie, portant une grave atteinte à la dignité et à l’indépendance de la Justice (fin de la postulation, possibilité pour des entreprises tiers d’entrer dans le capital des sociétés d’avocats, Nouvel avocat salarié en entreprise ….)
Ces décisions prises sans concertation avec les représentants des avocats d’Outre mer et de Province exerçant quasi essentiellement dans des petites structures, marqueront la fin d’une garantie de justice de qualité et de proximité.
Les Martiniquais n’auront plus d’avocats à leur image.
Les Ordres professionnels et le Bâtonnier pourraient disparaître ce qui ne préservera plus les intérêts des clients lorsqu’ils devront se plaindre d’un confrère s’arrangeant avec les règles, ce qui sera de plus en plus légion car la réforme envisage que sans avoir passé l’examen d’avocat, sans avoir suivi les cours notamment en déontologie qui rappellent aux avocats leurs obligations, sans avoir passé le CAPA, on puisse devenir « avocat ».
Cette mesure créera d’ailleurs une inégalité entre ceux dont les parents se sont sacrifiés pour que leurs enfants suent à passer l’examen d’accès très restrictif afin de devenir « avocats » après 6 années d’études, et les autres qui sans même les conditions de diplôme, parce qu’ils auraient exercé en entreprise pendant 5 ans pourraient embrasser notre profession.
Pire, dans la mesure où le gouvernement obéit à des lobbies capitalistes dont l’objectif est de faire disparaître les petites structures au profit de sociétés à forts capitaux n’ayant aucune considération humaine, les nouvelles générations de Martiniquais n’auront plus la chance de profiter de l’ascenseur social que représentaient notre profession d’Avocat mais également celles de Pharmacien et de Dentiste ….. également touchées par MACRON.
Le mérite et la compétence céderont définitivement la place aux connivences et au réseau. Or, nous savons que par essence, le réseau est discriminant.
Nous n’évoquerons pas la réforme prévue pour le Conseil de Prud’hommes et l’atteinte envisagée au repos du Dimanche et bien d’autres mesures incohérentes du projet de loi MACRON voulues par des élites sorties de banques d’affaires qui n’ont aucune idée du haut de leur tour d’ivoire et des privilèges dont ils bénéficient, des souffrances des consommateurs, des salariés ou des dirigeants des petites entreprises.
Parce qu’un avocat en état de nécessité ne pourra dignement assurer la défense des Justiciables,
Parce qu’un avocat en état de dépendance économique et juridique signera la mort de l’avocat indépendant et debout,
Parce qu’à jamais muselés seront les sans-voix, privés de défenseurs,
Nous convions l’ensemble de la population à nous rejoindre le matin du mercredi 10 décembre 2014 devant le Palais de Justice pour la survie de la défense des Martiniquais.
Frédérique URSULE
Avocat à la Cour depuis 11 années
Fred GERMAIN
Avocat à la Cour depuis 1 an