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Mobilisation Pour Sauver l’Hôpital de Marie-Galante

Maryse Etzol : Pour bien comprendre ce qui se passe aujourd’hui, je me dois de vous faire quelques rappels qui me semblent indispensables.

D’abord c’est en 2003 que la décision de construire un hôpital tout neuf sur un nouveau site et que s’est faite la restructuration de l’hôpital Sainte Marie avec donc 50 lits ; 12 pour la maternité dont 2 lits en gynécologie ; 12 lits de médecine polyvalente ; 25 lits de chirurgie ; 1 lit pour les urgences. Et puis, il y a eu le p problème de la vacance du poste de directeur après le départ de Séné.

CCN : Et l’hôpital fonctionnait comment ?

M.E : Ecoutez, il y a eu des solutions provisoires…

CCN : C’est-à-dire ?

M.E : Pendant deux longues années, c’est-à-dire de 2004 à 2006 la suppléance était assurée par les directeurs du CHU PPA et du CHBT qui venaient à Marie Galante.
Et c’est seulement en 2006 qu’un directeur en titre est arrivé et dévolu exclusivement à l’hôpital de Marie Galante. Vous noterez que dès son ouverture, le HSM n’a pas eu un fonctionnement… Disons normal. Mais, ce n’est pas tout. C’est alors qu’en 2007, dans l’impossibilité de pouvoir répondre aux ratios obligatoires en personnel infirmier, il a été décidé de la fusion des services de médecine et de chirurgie à titre provisoire et une réflexion a été menée sur l’éventuelle reconversion vers de la chirurgie ambulatoire ou toute autre activité. Vous imaginez que cela n’a pas été sans conséquence, d’où un nouveau schéma de fonctionnement. 13 lits ont donc été rendus indisponibles et toute une aile de l’hôpital fermée. A cela, il faut ajouter le fait que la fermeture a généré d’autres problèmes : les bras morts dans les réseaux d’eau, la contamination du réseau, quand des locaux sont pas ou mal entretenus, inévitablement cela crée d’autres problèmes d’hygiène. C’est ainsi qu’il y a eu une nouvelle répartition : 10 lits de médecine ; 14 en chirurgie ; 12 en maternité et 2 lits portes pour les urgences.

CCN : Mais, que se passe-t-il vraiment pour le service de chirurgie ?

M.E : C’est là un vrai problème. Trop peu d’actes y sont pratiqués eu égard aux normes imposées, garantissant il est vrai, une qualité et une sécurité minimales pour des actes purement techniques
Il y a, il faut le dire, un plateau technique irréprochable, mais, s’est-on assuré de la pertinence des choix et du dynamisme des moyens humains nécessaires et suffisants pour avoir le résultat réclamé aujourd’hui ? C’est une vraie question…

CCN : Vous voulez dire que ce service ne répond plus aux normes de rentabilité définies par le Ministère français de la santé ?

M.E : Le problème est celui-là, d’un point de vue purement administratif, un service de chirurgie ne peut continuer à fonctionner avec moins de 1500 actes par an. Or l’hôpital Sainte Marie ne pratique depuis les derniers mois de 300 actes par an.

Sur un plan purement technique, ceci n’est bon ni pour les praticiens qui vont «perdre la main» ni pour les patients.
Il faut donc trouver des solutions pérennes garantissant la sécurité des patients et le maintien du niveau de technicité des chirurgiens.

A mon avis, une complémentarité est donc indispensable avec le CHU de Pointe à Pitre et le CHBT permettant aux praticiens d’exercer alternativement en Guadeloupe et à Marie Galante.

CCN : Et cela résoudrait le problème ?

M.E : Vous savez, Marie Galante n’a que 12000 habitants, nous ne pourrons jamais satisfaire aux ratios imposés. Une adaptation à la réalité du terrain est indispensable, tout en garantissant la sécurité sanitaire de l’île et de ses habitants.

CCN: Soyons concrets, pour éviter la fermeture de la chirurgie, il y a une solution docteur ?

M.E : Mais, je crois que des pans entiers de l’activité chirurgicale pourraient y être développés : La chirurgie ambulatoire : l’urologie (la biopsie prostate, la cystoscopie, la cure de phimosis) ; l’ophtalmologie (chirurgie de la cataracte) ; la gastrologie (fibroscopie et coloscopie) ; la stomatologie et jusqu’à la petite chirurgie esthétique ainsi que bien sur la chirurgie viscérale et la petite traumatologie. Autant d’actes qui pourraient être faits sur place.

CCN : Il y a donc un réel intérêt à sauver cette structure ?

M.E : C’est plus qu’évident. Dois-je vous rappeler la dimension archipélagique de notre pays. Marie-Galante est à 45 minutes en avion ou en hélico. Je ne parle même pas du bateau. Donc, en cas d’urgence extrême… Et puis, la Guadeloupe ne dispose pas d’un nombre suffisant d’appareils pour assurer en même temps la sécurité des Guadeloupéens… disons du «continent» et la desserte des îles périphériques singulièrement les îles du Sud.
Prenons le cas de deux accidents de même gravité, l’un à l’Anse Bertrand, l’autre à Capesterre de Marie Galante où irons les secours de façons prioritaires ? Vous savez monsieur, que la Guadeloupe ne dispose que d’un seul vecteur (hélicoptère) pour assurer les évacuations sanitaires d’urgence.

A tout cela, il faut ajouter les conditions géographiques et atmosphériques particulières à notre archipel. Vous le savez, en période cyclonique, Marie Galante est isolée pendant au moins 3 jours pleins.

Quand on sait qu’il y a de vraies urgences nécessitant la présence d’un chirurgien dans l’heure, l’intérêt de la structure est donc d’assurer aux marie-galantais le droit à la santé tout simplement. Nous avons donc vis-à-vis de la population de Marie Galante une obligation de moyens.

CCN : Votre point de vue, est celui d’un médecin mais, vous êtes aussi une élue, il y a eu concertation ?

M.E : Bien entendu, les élus de Marie Galante sont unanimes et solidaires pour défendre ce dossier, le conseiller général et moi-même conseillère régionale, nous avons eu le soutien du président du Conseil Régional Victorin Lurel ainsi, que celui du président du Conseil général M. Gillot.

Nous espérons surtout pouvoir convaincre l’Etat du bien fondé de notre démarche et souhaitons être entendus et écoutés dans l’intérêt supérieur de la population marie galantaise afin d’assurer sa sécurité sanitaire.

CCN : Les soins hospitaliers sont simplement une question budgétaire, on a un peu zappé, la dimension humaine ?

M.E : L’arrivée de la tarification à l’activité (la T2A) a malheureusement un peu plus déshumanisé l’hôpital. Nous médecins, le déplorons tous les jours.

Nous devrions agir en gestionnaire d’entreprise sans y avoir été préparé et non en médecin qui avons appris à prendre en charge l’humain dans ses dimensions physiologiques et psychologiques, mentales, sociales. Je voudrais surtout que chacun comprenne que la sauvegarde de cette unité de soins a aussi une double dimension économique et sanitaire pour Marie Galante, car, comment voulez-vous développer le tourisme dans cette île, si les visiteurs n’ont pas la garantie de soins en cas de besoin ? Et plus grave pour les marie-galantais car, la survie de l’île passe par la sécurité sanitaire du territoire et cela on ne peut l’ignorer.