Je me garderai bien de me poser en défenseur de Maryse Condé. Mais je demande qu’on relativise ses propos et qu’on cesse de voir dans son départ une forme de trahison. Pourquoi ? Parce que parmi nos diplômés et « intellectuels » martiniquais et guadeloupéens, il en existe qui sont dix fois pire, cent fois plus nocifs pour la cause antillaise, et qui pourtant sont bien installés, définitivement installés en Martinique et en Guadeloupe. Le plus grave est que ces individus, pour la plupart, furent membres, dans les années 70-80, membres ou dirigeants, d’organisations trotskystes, nationalistes, maoïstes ou d’extrême-gauche. A l’époque, il était hors de question pour quelqu’un partageant ces idéologies d’occuper des postes de « fonctionnaires d’autorité » car on y voyait, à juste titre, un moyen de conforter le système colonial.
Or, que constate-t-on aujourd’hui ? De soi-disant trotskystes, maoïstes, nationalistes ou d’extrême-gauche se sont battus pour occuper des postes de directeurs ou de chefs de service dans l’administration coloniale française ! A la lutte des classes s’est substituée la lutte des places. Particulièrement nombreux dans le système scolaro-universitaire, ces ralliés au système paradent à la tête de lycées, d’IUFM, d’IUT ou d’antennes universitaires où ils n’hésitent pas à s’allier aux Métros les plus réactionnaires pour d’une part, faire avancer leur petite carrière, d’autre part, se faire bien voir des autorités coloniales et se maintenir le plus longtemps en place, voire obtenir des promotions.
On est en droit dès lors de se demander s’il s’agit encore d’ « intellectuels », d’autant que la minceur, pour ne pas dire la médiocrité, de leurs travaux ou productions, les ont rendus internationalement connus du Vauclin à l’Ajoupa-Bouillon ou de Bouillante à Petit-Canal. Au moins Maryse Condé est-elle connue à New-York, Paris, Londres, Tokyo etc…et ses livres font-ils connaître (et aimer) la Guadeloupe dans toutes ces contrées, ce dont nous ne pouvons que lui être reconnaissants. Au moins n’a-t-elle jamais cherché à occuper le moindre poste dans le système colonial français, chose qu’elle aurait pu, soyons honnêtes, obtenir sans difficultés. Au moins n’a-t-elle pas présenté dix fois l’agrégation pour se faire finalement adouber par un copain. Au moins n’a-t-elle pas léché les bottes d’universitaires métros pour qu’ils lui ouvrent les portes de l’Université. Et après ça a le culot de se poser en historien, sociologue, anthropologue ou je ne sais quoi !
Les ralliés au système colonial, gauchistes ou nationalistes d’hier, sont les complices objectifs, voire actifs, du processus de génocide par substitution qui affecte nos pays depuis quinze ans. En effet, dans les institutions que ces messieurs-dames « dirigent », la part belle est faite aux gens venus d’ailleurs parce que c’est là la politique décidée par l’Etat français, un point c’est tout. Etat qui propose à certains d’entre eux des strapontins « en métropole » dans des organismes tels que la HALDE ou le Haut Comité à l’Intégration. Hier nationalistes, ces messieurs-dames plaident aujourd’hui pour notre assimilation totale à la mère-patrie, se faisant au passage les champions du droit-de-l’hommisme sioniste, tout cela pour quelques billets d’avions, deux-trois nuits d’hôtel à Paris et leur tronche dans le journal ou à la télé de temps en temps.
Décidément, non ! Je ne peux pas condamner Maryse Condé et ses propos quand je vois ces « racailles » au sens sarkozyen du terme, fermement installées dans nos pays et déterminées à jouer jusqu’au bout leur misérable rôle de Judas, de traîtres à leur pays et à leur culture. Petits directeurs ou chefs de ceci ou de cela, ils sont, dans le fond, cent fois pires que les assimilationnistes de Droite. Des crevures comme on dit dans le milieu du grand banditisme.
Maryse, quoi qu’il en soit, demeurera toujours une grande âme…
Raphaël Confiant.