Ça fait plusieurs années qu’ils rêvent de transformer le carnaval martiniquais en machine à fric Ils s’en foutent, en fait de ce que représente, de ce qu’est le carnaval pour les martiniquais. Ce qu’ils veulent c’est le modifier, transformer le carnaval actuel, populaire, désordonné, multiforme, subversif, plein de beauté et de créativité, en un produit touristique à même de leur remplir les poches. A la place, ces messieurs et dames veulent depuis longtemps faire un « Carnaval de la Martinique ». Un spectacle cosmopolite aseptisé, désossé de son âme créole et nègre, qu’ils vendront aux touristes et aux familles des « expatriés ».
Bien entendu, ils laisseront quelques miettes pour les artistes, les groupes à pieds, orchestres de rue et autre associations de carnaval, la sécurité, les vendeuses de sinobol et de korné-pistach…
Ces dernières années, on a vu à Fort-de-France, au fil du temps, insidieusement, que le carnaval martiniquais authentique, héritier direct du carnaval populaire de Saint-Pierre, était juste toléré et petite à petit repoussé aux marges.
Et voilà que la crise sanitaire du covid vient leur donner l’opportunité de passer à l’acte, de créer le carnaval de leur rêve d’argent : un spectacle dans une enceinte close, contrôlée, fliquée et surveillée. Un spectacle aujourd’hui gratuit mais qui inexorablement finira par devenir payant. Et, il ne faut pas que les quelques artistes locaux, dépotjolé par les restrictions dues à la crise Covid, pour qui ce format est une bouffée se croient tranquilles. Inéluctablement, les organisateurs feront venir des artistes du monde entier pour magnifier leur spectacle et satisfaire leur clientèle.
Non, le carnaval martiniquais n’est pas un spectacle. Il est l’expression de l’âme du pays, dans toute sa diversité et dans toutes ses contradictions, et c’est ce qui fait sa force et son authenticité.