En effet, sur le plan du droit donc, il est ainsi édicté et appliqué que nous, populations colonisées, n’avons hérité qu’insignifiance de nos ancêtres tout simplement parce que ces derniers n’ont rien inventé d’intéressant, que leurs mœurs, nos mœurs, nos coutumes, notre Histoire sont sous-humains et ne sont donc d’aucun intérêt pour que le droit qui nous régit puisse en naître. Que les institutions scolaires, universitaires, les politiques ou le jurislateur qui nous dirigent n’ont que faire de cette dimension de notre humanité, de notre intériorité, de notre dimension culturelle, de notre sagesse. Bref, qu’ontologiquement, nous n’avions pas la possibilité d’exister sur le plan du droit en tant que personnes humaines. Contrairement aux Blancs.
Et pourtant, la Règle de droit, n’est-elle pas d’abord l’expression juridique de l’existence d’une population humaine donnée ? En tous les cas, pas celle qui nous régit, puisqu’elle nous impose unilatéralement le statut d’affranchi, l’assimilation juridique, niant ainsi notre égale humanité avec les Blancs.
NOS ELUS DE LA FIN DU 19e SIECLE ET DU DEBUT DU 20e SIECLE LE SAVAIENT MAIS NOUS L’ONT CACHE
Et pour Cause ! Nos élus le savaient ! c’est pourquoi le Conseil Général de la Martinique a adressé le 24 novembre 1874 une requête à l’Etat français qui, s’il en était besoin, permet de bien illustrer cette vérité :
« Considérant que la qualité et les droits de citoyen français datent, pour les habitants des Antilles, de la fondation des colonies, que c’est le roi Louis xiii qui, dans son édit de 1642, concernant l’établissement de la Compagnie des îles d’Amérique, a voulu et ordonné : ‘‘Que les descendants des Français habitués aux dites îles, et même les sauvages convertis à la foi chrétienne, en faisant profession, soient censés et réputés naturels français, capables de toutes charges, honneurs, successions et donations, ainsi que les originaires et regnicoles, sans être tenus de prendre lettre de naturalité…’’
Que loin d’être abrogée à la reprise des colonies par le roi Louis xiv sur les seigneurs, cette disposition a été confirmée, octroyée aux affranchis par l’article 59 de l’Edit de 1685 […]
Considérant donc qu’en accordant les droits politiques aux populations coloniales en 1848 et en 1870, le gouvernement n’a fait que consacrer à nouveau des droits acquis antérieurement et remettre la pyramide sur sa base suivant une parole célèbre reproduite dans la pétition du Sénat de 1865.
[..]
Que cette revendication a été renouvelée en 1865 par une pétition au Sénat signée baron de Lareinty, au nom de 1.717 habitants de la Martinique, et en mars 1871, une commission de 45 membres de l’Assemblée Nationale […] :
‘‘Qu’il y aurait lieu de soustraire les colonies au régime exceptionnel et de les faire jouir des lois et de l’administration de la Mère-Patrie, en prenant pour devise de ce grand mouvement réparateur : assimilation politique des colonies à la Mère-Patrie.’’
Considérant que cette devise est devenue celle de tous les bons citoyens, aux yeux et dans les convictions desquels l’assimilation est le meilleur moyen d’assurer la paix et la concorde entre les anciennes classes divisées de la société coloniale ; de même que l’ordre, la conciliation et le progrès que le chef de la colonie nous déclarait hier être la voie dans laquelle entend marcher l’Administration, et la seule à laquelle s’attache la prospérité que nous désirons tous.
Émet le vœu : que les lois constitutionnelles attendues, particulièrement la loi électorale, comprennent les colonies comme terres françaises, parties intégrantes de la République, soumises à la même loi constitutionnelle, admise définitivement à la jouissance des lois et de l’Administration française 2 ».
Le 7 décembre 1882, ce même Conseil Général persiste : « Considérant que la Martinique qui est française depuis plus de deux siècles, qui jouit depuis 1870 des mêmes droits politiques que la métropole, se trouve dans les meilleures conditions possibles pour être assimilée complètement avec la mère-patrie.
Considérant qu’il importe de faire disparaître les différences humiliantes qui existent entre la colonie et un département français. […]Renouvelle en l’accentuant le vœu qu’il a émis le 24 novembre 1874 et demande que la Martinique soit constituée le plus tôt possible en département français 3 ».
Or, bien que les élus locaux, comme il est ainsi démontré, avaient l’habitude de faire régulièrement référence au Code Noir et au statut d’affranchi comme étant l’ordre juridique qui nous régente effectivement et dont ils demandaient l’application pleine et entière ; bien qu’ils savaient et reconnaissaient parfaitement et sans aucune sorte d’ambiguïté que le statut d’affranchi est le même que celui de l’« assimilation » et de « département français » dans leur territoire, nous assisterons pourtant, à un moment donné, durant la première moitié du 20ème siècle, à une subtile disparition de la catégorie « affranchi » dans l’énoncé officiel tant de nos élus que de celui de l’Etat Français.
Pourquoi est intervenue une telle cachotterie des élus Martiniquais ? ont-ils voulu ainsi nous illusionner ? au profit de qui ? ou encore, est-ce parce qu’ils ont ressenti l’imposition d’un tel statut comme étant trop humiliante et ont souhaité dès lors nous épargner l’effet d’une telle prise de conscience ? En tout les cas, ils nous ont caché cette vérité !
L’ASSIMILATION JURIDIQUE EST INCONSTITUTIONNELLE
EN CONSEQUENCE
exigeons l’abolition du statut d’affranchi et sa substitution par le statut de personne juridique humaine.
Contacts téléphoniques : 0696 92 72 14 — O696 35 57 45 — 0696 39 77 20 — 0696 45 68 50
Email : mo_dominiq@hotmail.com ; diop972@yahoo.fr ; msm31@wanadoo.fr