Présence élevée de pesticides dans le vin 13 ème législature
Question orale sans débat n° 0247S de Mme Anne-Marie Payet (La Réunion – UC-UDF)
* publiée dans le JO Sénat du 15/05/2008 – page 939
Mme Anne-Marie Payet appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur les résultats d'une étude récente mettant en évidence la présence élevée de pesticides dans le vin.
Elle lui rappelle que cette campagne d'analyses – qui portait sur divers vins d'Europe et du monde entier – a été réalisée par les associations du Pesticide Action Network-Europe (PAN- Europe) dont fait partie le mouvement pour le droit et le respect des générations futures (MDRGF).
Quarante bouteilles de vin rouge ont été ainsi analysées, en provenance de France, d'Autriche, d'Allemagne, d'Italie, du Portugal, d'Afrique du Sud, d'Australie et du Chili ; trente-quatre provenaient de l'agriculture intensive et six de l'agriculture biologique.
Les résultats de cette étude démontrent que 100% des vins conventionnels testés étaient contaminés, chaque échantillon contenant en moyenne plus de quatre résidus de pesticides différents, les plus contaminés d'entre eux contenant même jusqu'à dix pesticides !
S'il est vrai que les niveaux de contamination sont variables et ne dépassent pas la limite maximale autorisée (ou LMR), elle tient à souligner qu'il n'existe pas à proprement parler de LMR pour le vin, et que l'on se réfère à celle utilisée pour le raisin qui sont très élevée.
Elle ajoute que les niveaux de contamination observés dans le vin sont beaucoup plus élevés que les niveaux tolérés pour les pesticides dans l'eau car on a trouvé dans certains vins testés des quantités jusque 5800 fois supérieures aux concentrations maximales admissibles autorisées par pesticide dans l'eau du robinet.
Ces résultats témoignent d'une utilisation très intensive de pesticides en viticulture. Or, parmi les résidus trouvés, de nombreuses molécules sont des cancérigènes possibles ou probables, des toxiques du développement ou de la reproduction, des perturbateurs endocriniens ou encore des neurotoxiques. Les risques sanitaires encourus par les consommateurs sont donc considérables.
Dans ce contexte, elle lui demande de bien vouloir lui faire connaître les mesures que le Gouvernement entend mettre en œuvre afin réduire l'utilisation de pesticides dans la viticulture, et ce conformément aux décisions du Grenelle de l'environnement.
Elle lui demande également s'il est envisageable de diminuer la limite maximale autorisée (LMR) pour le raisin et d'instaurer une LMR spécifique pour le vin.
Réponse du Secrétariat d'État chargé du développement de la région capitale
* publiée dans le JO Sénat du 04/06/2008 – page 2527
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet, auteur de la question n° 247, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.
Mme Anne-Marie Payet. Monsieur le secrétaire d'État, ma question porte sur les résultats d'une étude récemment publiée mettant en évidence la présence élevée de pesticides dans le vin.
Cette campagne d'analyses, qui portait sur divers vins d'Europe et du monde entier, a été réalisée par les associations du Pesticide Action Network-Europe, PAN-Europe, dont fait partie le mouvement pour le droit et le respect des générations futures, le MDRGF.
Quarante bouteilles de vin rouge ont été analysées, en provenance de France, d'Autriche, d'Allemagne, d'Italie, du Portugal, d'Afrique du Sud, d'Australie et du Chili ; trente-quatre provenaient de l'agriculture intensive et six de l'agriculture biologique.
Cette étude démontre que 100 % des vins conventionnels testés sont contaminés, chaque échantillon contenant en moyenne plus de quatre résidus de pesticides différents, les plus contaminés d'entre eux contenant même jusqu'à dix pesticides !
S'il est vrai que les niveaux de contamination sont variables, j'insiste sur le fait qu'il n'existe pas à proprement parler de limites maximales de résidus, ou LMR, autorisées pour le vin et que l'on se réfère à celles que l'on utilise pour le raisin et qui sont déjà très élevées.
Par ailleurs, les niveaux de contamination observés dans le vin sont beaucoup plus élevés que les niveaux tolérés pour les pesticides dans l'eau, car on a trouvé dans certains vins testés des quantités jusque 5 800 fois supérieures aux concentrations maximales admissibles autorisées par pesticide dans l'eau du robinet.
Ces résultats témoignent d'une utilisation très intensive des pesticides en viticulture. La viticulture utilise 20 % des pesticides sur 3 % de la surface agricole. Or, parmi les résidus trouvés, de nombreuses molécules sont des éléments cancérigènes possibles ou probables, des toxiques du développement ou de la reproduction, des perturbateurs endocriniens ou encore des neurotoxiques. Les risques sanitaires encourus par les consommateurs sont donc considérables.
L'objectif de ma question, monsieur le secrétaire d'État, n'est pas d'attaquer le vin et la viticulture. Au contraire, il s'agit d'améliorer le vin, qui est souvent considéré comme une boisson saine, voire bénéfique pour la santé lorsqu'il est consommé avec modération. Or le fait de permettre une telle concentration de pesticides dans le vin nuit à sa réputation.
Monsieur le secrétaire d'État, le Gouvernement doit faire en sorte que les législations européennes en préparation sur les pesticides éliminent les plus dangereux d'entre eux, qu'elles favorisent les systèmes qui réduisent fortement ou excluent le recours à ces toxiques.
Dans ce contexte, je vous saurais gré, monsieur le secrétaire d'État, de bien vouloir me faire connaître les mesures que vous entendez mettre en œuvre afin de réduire l'utilisation de pesticides dans la viticulture, conformément aux décisions du Grenelle de l'environnement.
Je souhaiterais également savoir s'il est envisageable d'instaurer des limites maximales de résidus autorisées spécifiques pour le vin.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Blanc, secrétaire d'État chargé du développement de la région capitale. Madame la sénatrice, je vous prie tout d'abord d'excuser l'absence de M. Michel Barnier, qui accompagne en ce moment même le Président de la République au sommet de la FAO à Rome. Sachez cependant que, même si mes fonctions ont peu de rapport avec votre question – le vignoble en région parisienne est encore relativement peu développé (Sourires) –, je pense pouvoir vous apporter un certain nombre de réponses au nom du Gouvernement, qui, je l'espère, apaiseront vos inquiétudes.
Les résultats de l'étude menée par PAN-Europe – réseau européen d'action contre les pesticides – sur quarante vins mondiaux, dont trente-quatre issus de la filière conventionnelle et six provenant de l'agriculture biologique, montrent l'absence de résidus de produits phytopharmaceutiques dans les vins d'agriculture biologique et des teneurs très faibles en résidus pour les vins de la filière conventionnelle, soit de 20 à 5 000 fois inférieures aux limites maximales autorisées pour le raisin. Il n'y a pas donc de risque pour le consommateur de vin, contrairement à ce que vous indiquez.
Malgré le manque de représentativité de cet échantillon par rapport à la production mondiale de vin, il convient de souligner que les produits détectés dans cette étude sont tous autorisés. Ils servent à protéger la vigne des principales maladies, comme le mildiou, pouvant compromettre la pérennité de la plante et la qualité des vins.
Par ailleurs, ces produits font l'objet d'un plan de surveillance des résidus, mis en place par le ministère de l'agriculture, qui montre que les LMR sont bien respectées et que les quelques molécules détectées le sont à des teneurs faibles, nettement inférieures à celles qu'on observe sur le raisin.
L'utilisation des produits phytopharmaceutiques est strictement encadrée par la réglementation communautaire. Pour tous les produits agricoles, les LMR sont fixées afin de garantir la qualité sanitaire des aliments et la sécurité des consommateurs.
En ce qui concerne la filière vin, les LMR sont fixées pour le raisin en tenant compte de sa transformation en vin. En effet, la vinification a un impact. Dès lors, seules quelques molécules présentes sur les raisins se retrouvent dans les vins, mais à des teneurs très faibles et nettement inférieures aux LMR pour le raisin.
Pour encadrer de façon plus précise encore l'utilisation de ces produits, il existe également des limites maximales de résidus sur vin en voie d'être officialisées à l'échelle de l'Union européenne. Les LMR correspondent à un taux de concentration fixé en fonction de la toxicité potentielle des molécules.
Cette notion de LMR ne peut pas être comparée à la limite de 0,1 microgramme par litre fixée pour l'eau potable dans la mesure où cette valeur correspond avant tout à une limite de détection.
Dans le cadre du Grenelle de l'environnement et pour promouvoir des pratiques agricoles durables, les professionnels de la viticulture, en liaison avec le ministère, participent activement à l'objectif général de diminution de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques de 50 % dans les dix prochaines années.
II faut enfin souligner l'engagement de l'ensemble de la filière vitivinicole française et des pouvoirs publics en faveur d'un investissement important en matière de recherche et de développement pour maîtriser et réduire l'utilisation des intrants.
En synthèse, que peut-on dire ? Est-ce dangereux pour le consommateur ? La réponse est non.
Est-ce une question nouvelle ? La réponse est également non.
La situation s'aggrave-t-elle ? Non, au contraire, car toutes les mesures qui sont prises vont dans le sens de l'amélioration.
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. Monsieur le secrétaire d'État, votre engagement à diminuer de moitié l'utilisation de ces produits toxiques en dix ans est une réponse positive.
La viticulture devrait s'orienter vers la fabrication de vins biologiques, car, comme vous l'avez précisé, l'étude a montré que les vins analysés ne renfermaient pas de résidus de pesticide, à l'exception toutefois d'un échantillon de Bourgogne dans lequel de faibles quantités d'un produit ont été trouvées. Toutefois, cette présence s'explique par des pulvérisations sur des parcelles voisines.
La contamination des produits biologiques, même si elle est rare et à faible quantité, est inacceptable.