SEMAVIL | SEMAFF | |
2010 | 2010 | |
Capitaux Propres | 2 091 985 € | 1 918 273 € |
Dettes auprès des banques | 6 502 307 € | 22 188 233 € |
Dettes fiscales et sociales | 1 789 614 € | 1 160 317 € |
Dettes fournisseurs | 4 892 669 € | 12 603 108 € |
Stock | 12 387 174 € | |
Créances Clients | 9 169 420 € | 11 946 045 € |
Trésorerie | 8061 € | 1 113 443 € |
Résultat d’exploitation |
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-1 754 646 € |
Résultat financier | -272 550 € | 319 466 € |
Résultat exceptionnel | -342 920 € | 840 719 € |
Résultat Global |
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-594 461 € |
Les élus de la majorité ont accordé 1 200 000€ à ces deux SEM, au vu de quelques chiffres de l’année 2010. S’il s’était agi d’une entreprise privée, elle aurait été contrainte de fournir, l’ensemble des informations comptables les plus récentes, c’est-à-dire, tous les chiffres des années 2011 et 2010 !
L’information comptable partielle, fournie aux élus, résultent d’une dégradation continue, depuis de nombreuses années, des indicateurs de gestion de ces SEM :
- Une dégradation continue des capitaux propres,
- Des niveaux d’endettement de plus en plus extravagants,
- Une trésorerie de plus en plus exsangue,
- Des résultats se dégradant jusqu’au niveau d’une exploitation déficitaire, indicateur qui aurait déjà conduit à la liquidation d’une entreprise du secteur privé,
- De plus, ces SEM travaillent à Fonds perdus pour des clients « indélicats » qui n’honorent pas leurs dettes…
- Les fournisseurs qui ont travaillé pour ces SEM, ne sont pas payés, à hauteur de 213 années de SMIC chargé pour la SEMAVIL et 549 années de SMIC chargé pour la SEMAFF !!
L’argument qui est avancé pour justifier les dons financiers de la Région au bénéfice de ces SEM est la préservation des emplois (pour qui ?), mais dans le même temps, il faut dire que le non paiement des fournisseurs est destructeur d’emplois (pour qui ?).
Panorama des SEM de Martinique
Il existe en Martinique de nombreuses SEM qui œuvrent dans des secteurs divers et variés :
- la SIMAR dans le domaine du logement social avec un statut spécial,
- la SEMAM qui gère l’abattoir départemental,
- la SAEM du Galion qui gère notre production résiduelle de sucre et de rhum industriel,
- d’autres gèrent le transport public de passagers comme la SFTU avec Mozaïk
- sans oublier nos trop nombreuses SEM d’aménagement :
- SODEM, SEMAFF, et la SEMAVIL qui non contente de s’occuper bon an, mal an d’aménagement et de logements, a rajouté à sa carte de visite la gestion hôtelière,
- SEMA, SEM SUD, SEM de Case Pilote…
La nécessité d’un secteur d’économie mixte ou publique est incontestable. Ce secteur positionné entre le tout public et le tout privé est composé d’entreprises commerciales à capital majoritairement ou exclusivement public ; SEM ou SPL (Société Publique Locale) ou SPLA (Société Publique Locale d’ Aménagement) contrôlées par les collectivités publiques et qui ont une double vocation :
1) être au service des collectivités locales et de leurs habitants,
2) privilégier les ressources locales. En un mot, faire mieux et moins cher que le privé !
Dans notre économie insulaire, la coexistence d’un secteur d’économie mixte ou publique à côté du secteur privé dont la finalité principale est la rentabilité peut contribuer à une certaine efficacité économique.
Certaines des sociétés publiques locales martiniquaises sont correctement gérées et rendent au quotidien des services à la population martiniquaise, par exemple dans le domaine du logement social. D’autres sont structurellement déficitaires mais rendent des services irremplaçables aux administrés, c’est le cas de la SEM abattoir départemental et de la SAEM usine du Galion. Les subventions d’exploitation dont bénéficient ces SEM ont pour but de maintenir ces activités indispensables pour notre pays, et de contenir les pertes d’exploitation au plus juste.
Concernant les SEM d’aménagement, elles sont trop nombreuses sur le territoire, sous dotées en moyens humains hautement qualifiés et expérimentés. L’étroitesse du marché, les comptes publics dégradés des collectivités locales n’offrent pas la visibilité propice à de tels recrutements ce qui les privent d’atouts précieux, lors des mises en concurrence obligatoires sur les marchés substantiels.
Les SEM notoirement mal gérées, le sont par des responsables politiques ou par des administratifs convertis en gestionnaire inamovibles qui en réalité ne rendent de compte à personne sur les conséquences de leurs choix gestionnaires.
La question se pose de savoir, si la gestion des SEM qui sont des outils industriels et commerciaux régis par des règles de droit privé et commercial, doit continuer à être exercée par des responsables politiques. Le rôle des politiques devraient se limiter à formaliser des objectifs politiques et ce sont des professionnels de la gestion, en capacité de traduire les objectifs politiques en stratégies entrepreneuriales qui devraient les mettre en œuvre avec quelques chances de succès. Les gestionnaires devraient toujours être en situation de gérer ces structures, en faisant abstraction de toute considération électoraliste totalement improductive au plan collectif.
Quelles perspectives pour les SEM de Martinique ?
Les SEM présentées par l’actuel Président de Région, comme un outil de développement très important, suscite chez ce dernier une véritable frénésie de création, au point qu’il est envisagé la création d’une SEM énergie, la Création d’une SEM-mère pour regrouper et préserver toutes les SEM d’aménagement déjà existantes même si ces dernières sont qualifiées de « cadavres » par la première-vice présidente de la Région lors de la Plénière du 27 Juillet dernier, au vue de leur situation financière extrêmement dégradée.
Les SEM, objets de toutes les sollicitudes du Président de Région n’ont pas fait leur preuve en matière de performance, mais qu’importe ! Puisque les fonds publics de la Région, de la municipalité du Lamentin et de Fort-de-France, peuvent les maintenir en vie (voir les ressusciter) contre vents et marées.
On peut légitimement s’interroger sur l’engouement des tenants de la nouvelle gouvernance pour les SEM ; structures anciennes, pas très modernes, même quand elles sont à l’état de « cadavre », que l’on pense pouvoir ressusciter en les arrosant de millions d’euro prélevés sur les contribuables martiniquais. En la circonstance un essai d’arrosage à l’eau bénite pourrait se révéler plus efficace!
L’opacité voulue, par le manque de communication, des états comptables de ces SEM ainsi que des conclusions de l’audit dont elles ont fait l’objet, est suspecte.
Une vaste réflexion, une analyse stratégique fine, s’impose sur la situation et l’évolution des SEM de Martinique. Il convient dans ce cadre de tenir compte de :
- L’état financier de ces structures, par une analyse rétrospective de leurs comptes,
- Des conclusions de l’audit déjà réalisé,
- De l’environnement économique de ces structures : par exemple la DDST ( Direction Départementale des Services Technique du Conseil Général) intervient en concurrence sur les mêmes marchés (construction d’écoles…)…
- De l’existence d’outils plus modernes. En effet, depuis 2010, le champ de compétence des SPL et SPLA a été élargi et ces structures ne sont pas soumises aux règles de la concurrence, à condition de ne travailler que pour les collectivités actionnaires. Il suffirait de leur donner les moyens de mener à bien leurs missions face à des multinationales peu scrupuleuses et expertes en contentieux !
Les options possibles, résultant de cette analyse stratégique objective, devront ensuite faire l’objet d’une discussion démocratique au sein de l’Assemblée Plénière de la Région. C’est la seule alternative, de nature à permettre une prise de décisions pertinentes et efficientes concernant ces SEM, dans l’intérêt des martiniquais et des deniers publics de plus en plus rares. Les martiniquais, eux, ont déjà compris qu’il faut moins, mais mieux dépenser !!
Danielle BORIEL, Louis-Félix Vincent DUVILLE