Bondamanjak

SOYONS !

Tant d’années, de décennies, de siècles à nous faire comprendre que nous n’étions capables d’œuvrer, de bâtir, d’agir ou de réagir !Tant de ruses, de stratagèmes aux allures dogmatiques pour nous faire avaler, puis digérer notre incapacité dite naturelle à nous construire tel un peuple, à édifier, à progresser.

Détruire tout sentiment, voire aspiration nationaliste, car bien trop dangereux et entretenir une docilité pigmentée de soubresauts perclus et accommodants.
Diluer tout lien avec l’Afrique car nous aurions pu alors nous revendiquer d’un continent qui a fait l’Humanité.

Brouiller toute recherche qui aurait pu nous conduire à la civilisation éthiopienne, seule nation à avoir conservé sa souveraineté pendant le démembrement de l’Afrique au XIXe siècle, ou effacer toute trace nègre de l’histoire de la brillante civilisation égyptienne.Les appareils colonisateurs ont très tôt cerné les dangers encourus de permettre aux colonisés d’être conscients de leurs racines, de leur histoire.
Quelque soit notre histoire, nous devons la connaître et maîtriser les enjeux de cette connaissance. Perte de temps ou connaissance rétrograde ? Non ! Connaissance éclairante !

Il est si facile d’utiliser la mondialisation, le modernisme pour rendre cette quête de savoir historique optionnelle. Telle une nostalgie stérile ou une posture passéiste. L’on pourrait même utiliser, comme argument, les difficultés actuelles de notre société pour mieux nous pousser à regarder en avant et à oublier définitivement notre passé et nos spécificités.

Il est si facile de faire vaciller un arbre, aussi robuste soit-il, qui n’a plus de racine.

Nos racines ?
Notre histoire,
nos luttes,
nos penseurs qui nous ont laissé des perspectives d’évolutions,
nos héros,
nos révoltes
notre Culture,
nos Arts,
notre tempérament,
nos valeurs,
nos représentations, notre imaginaire…
Ce qui nous a fait et qui nous fait encore.

Des insurrections d’un hier si proche aux mobilisations d’aujourd’hui, nous avons les signes manifestes de l’existence de notre peuple. Un peuple qui peut également s’exprimer quotidiennement, au-delà de ces manifestations paroxistiques.

Un peuple qui peut afficher son existence ou son unité à travers ses choix de vie, d’évolution institutionnelle et économique, son désir éclairé d’ouverture, son analyse ou son refus des modes sociétales occidentales chaotiques qui imprègnent et bousculent nos valeurs, nos familles, notre jeunesse.

Un peuple qui rejette définitivement une construction par mimétisme.

Résistons aux armes et aux stratégies chroniques de l’aliénation culturelle.

Evitons la tentation de la division qui fait sourire ces Autres.

Serrons nos lèvres à la béquée anesthésiante et réconfortante du matérialisme et du consumérisme.

Soyons sourds aux litanies perfides des apôtres allaités au consensus séducteur et stérile.

Et regardons sans sourciller les enjeux qui s’imposent à nous aujourd’hui, forts de notre histoire et de notre culture !

Face à la cacophonie des empires économiques occidentaux fébriles qui ont définitivement cessé d’être des exemples de développement et d’égalité sociale, Soyons !

Nous pouvons ensemble imaginer avec ambition, pragmatisme et sérénité notre devenir et entamer, unis, sa réalisation.                                                                          

Manuel CESAIRE