Bondamanjak

Tour des Yoles 2006, société et économie (fin)

Dernier épisode de notre série sur le Tour des Yoles 2006. Tour à tour ont été évoqués l'aspect sportif, la couverture télévisée et la sécurité. Aujourd'hui, pour conclure, les aspects culturels et économiques. Pendant une semaine, et ce n?est pas un lieu commun, le pays a vécu au rythme du Tour. Même, les habitants de la cote ouest, mangeurs de poissons blancs, plus férus, jusqu?à ces dernières années, de courses à l?aviron entre canots tels les célébrissimes « Innocent » de St Pierre, « Frappé des Ailes II » de Sch?lcher, « Emulation » de Bellefontaine ou « Renouveau » du Carbet, ont jeté un ?il sur leur poste de télévision. Aujourd?hui, les Martiniquais considèrent le Tour des Yoles comme leur bien, comme un bien qui a vocation à toucher à l?universel. Alors, la course gagnerait à ne plus être vécue et commentée comme un duel de clocher entre jeunes gens des communes de la cote est, celles où on mange plutôt du poisson rouge et où on allait pêcher dans le temps à la voile. L?évènement en sortirait magnifié, habillé à l?échelle du pays et non plus seulement vestige, aujourd?hui télévisé et médiatisé, de querelles ancestrales entre marins pêcheurs du Robert et du François. D?autant qu?au large ou dans les baies, dans l?Atlantique ou au vent du Rocher, des entreprises locales tiraient des bords avec des multinationales. Digicel, Only, Orange, sociétés de téléphonie étaient bord à bord avec Air Caraïbe et GFA Caraïbe. Ti-soda et Brasseries Lorraine faisaient un match-racing tandis que Mirsa prenait le vent de Joseph-Cottrell/Leader Price. Rosette était tribord amure sur « l?adonnante » talonnée par Géant. A terre, le pays a paru vraiment petit. Il y avait des embouteillages monumentaux. Les bords de mer et les mornes étaient noirs de monde. Les bourgs des communes inaccessibles. Et partout, dans les bureaux, les usines, les ateliers, les cabinets, les commerces,… il y avait, discrètes ou tonitruantes, des radios. Les hôtels étaient pleins aux villes étapes et alentour. Pire, des clients ont été priés de libérer des chambres et de chercher ailleurs pour une nuits ou deux afin de laisser la place à l?armada du Tour. Les ajoupas et paillotes au bord de mer, les stations-service, les boutiques photos, les loueurs de bateaux, les municipalités, les « gadè?d zafè » et les « séansié », les commerces alimentaires, les vendeurs d'alcools en tout genre notamment, ont directement et copieusement bénéficié de la fête. Pourtant, tout a semblé, encore une fois, empirique et spontané. Inorganisé. Puis, s'est ajoutée la polémique liée aux pénalités et à des réclamations non prises en compte. Au plan sportif, l'écart est apparu vraiment trop important entre quatre, mettons cinq yoles toujours en de tête et les autres. Et ça, c'est un problème structurel fondamental que le Tour devra résoudre pour gagner en crédibilité. Parce que, quand une demi-heure après le départ il n'y a plus que trois yoles dans la course pour la victoire, ça fait un peu farce… Il ne faut toutefois pas oublier de féliciter ceux qui ont vraiment dû travailler pour offrir au pays un événement tellement porteur et susceptible de créer des richesses, même si les choses restent opaques. Peut-être est-il maintenant opportun de réfléchir à concevoir le Tour des yoles d?une façon plus globale et à l?organiser de telle sorte que toutes ses dimensions, sportive mais aussi touristique, médiatique et commerciale donc économiques, soient prises en compte. Comme le disait en substance, Jean-Michel Cabrimol, sans perdre son âme liée à la proximité et à la ferveur populaire, le Tour des Yoles gagnerait à éviter le mélange des genres et à employer des professionnels pour ce qui concerne l?organisation, au sens le plus large, de l?évènement. Au fait, Géant/UFR a gagné le Tour des Yoles 2006 devant Joseph Cottrel/Leader Price. Mirsa barré par Joseph "Athon" Mas a fait troisième.