Par ailleurs, et contrairement à ce que l’on veut nous faire croire, la nouvelle majorité régionale n’a pas eu à « tenter de rétablir un dialogue » qui aurait été rompu avec la précédente mandature.
2. La loi prévoit que les établissements publics de coopération intercommunale (E.P.C.I.) regroupant plus de 50 000 habitants et ayant mis en place un service de transport urbain sont éligibles au versement d’une part de la taxe (conditions remplies par l’Espace Sud en 2005). Toute la question a été de savoir qui devait faire prendre en compte les droits de l’Espace Sud en la matière. Ou bien la Région chargée entre autres de déterminer le mode de répartition de son produit, ou alors la Douane chargée du versement. L’ancienne mandature régionale a considéré qu’une fois le mode de répartition établi, c’était à la Douane de procéder au partage entre la CACEM et l’Espace Sud. Dans son courrier du 20 mai 2010, l’actuel président de Région, Serge Letchimy, reprend à son compte cette position de l’ancienne mandature. Il est vrai qu’en tant qu’ancien président de la CACEM (de 2001 à 2008), il est bien placé pour savoir que la Région n’a pas délibéré pour que la Douane décide de verser à la CACEM une part de la taxe. On peut d’ailleurs se demander pourquoi cette même Douane, après avoir versé une mensualité (une seule !) à l’Espace Sud en novembre 2007, a aussitôt arrêté de le faire et continué de verser l’intégralité de la part réservée aux E.P.C.I. à la CACEM.
3. Dans son courrier du 20 mai 2010, l’actuel président de Région introduit cependant un élément nouveau par rapport à l’ancienne mandature. Il se permet de mettre en doute l’éligibilité de l’Espace Sud à la perception d’une part de la taxe. Loin donc d’avoir cherché à « faire évoluer rapidement cette affaire », comme il le prétend, il manifestait ainsi son peu de motivation à faire aboutir la demande de l’Espace Sud. Serge Letchimy sait pourtant combien la CACEM a en partie financé son service de transport urbain avec des sommes revenant à l’Espace Sud. Il sait combien la Communauté de l’Espace Sud a, elle, été contrainte de financer son service de transport urbain comme elle le pouvait (sans le concours de la taxe), alors même que les habitants du sud payent comme tous les Martiniquais cette taxe de consommation sur les carburants. C’est, en très grande partie, la logique d’obstruction dans laquelle s’inscrivait le nouveau président de Région qui a nécessité la saisine du Tribunal administratif par l’Espace Sud le 22 juillet 2010.
4. Le président de Région a ensuite confirmé cette logique d’obstruction. Ce fut notamment le cas lors d’une réunion de septembre 2011 entre le président de Région, le président de la CACEM et le président de l’Espace Sud ; réunion destinée à discuter des modalités de mise en œuvre de la décision du Tribunal administratif du 4 juillet 2010 condamnant la Région à verser à l’Espace Sud la part du produit de la taxe qui lui revient depuis 2005. Au cours de cette réunion, M. Letchimy a voulu imposer à l’Espace Sud un diktat ahurissant : si l’Espace Sud ne renonçait pas à une partie des sommes qui lui sont dues, le président de Région ferait appel de la décision du Tribunal (avec comme intention évidente de provoquer un ralentissement du règlement !) ! La Région a d’ailleurs même eu l’occasion d’évoquer un étalement sur 7 ans ! Autrement dit, les habitants et les transporteurs du sud, après avoir déjà attendu 7 ans (2005, 2006, 2007, 2008, 2009, 2010, 2011), pouvaient bien attendre au total 14 ans !
5. L’Espace Sud n’a jamais réclamé la somme de 13, 8 millions d’euros dans cette affaire. C’est une contrevérité grossière. Ce montant correspond à l’effort financier consenti par l’Espace Sud pour le transport urbain de 2006 à 2009. L’Espace Sud réclame simplement sa part du produit de la taxe.
6. Au nom de l’Espace Sud, j’ai très clairement fait la proposition d’un étalement du règlement de la dette. Un étalement raisonnable sur trois ans ; soit, pour une dette totale de 8 932 726, 77 €, des versements de 2 977 575, 59 € par an. Des versements à effectuer par la Région en janvier de chaque année (janvier 2012, janvier 2013, janvier 2014). Une formule qui, dans un souci de bonne gestion, a l’avantage de permettre de clôturer cette affaire avant la mise en place de la Collectivité unique et donc de ne pas lui léguer une part de cette dette.
7. L’Espace Sud, qui ne fait que réclamer ce qui lui est du, a clairement manifesté le souci de ne pas mettre en difficulté la CACEM qui doit rembourser le trop perçu. Suite à la décision du tribunal de juillet 2011, il n’a, par exemple, pas été exigé que la Douane verse à l’Espace Sud les sommes dues pour les derniers mois de l’année 2011, la CACEM ayant déjà prévu ces recettes à son budget. Par ailleurs, et répétons-le, l’Espace Sud a fait la proposition d’un étalement qui, à l’évidence, est acceptable et supportable par chacune des institutions concernées. Le président de Région, Serge Letchimy, a refusé cette proposition sur la base d’une évocation alarmiste de la situation financière d’une institution (la CACEM) qu’il a gérée pendant 7 ans. S’il s’inscrit, comme il le dit, dans « une démarche amiable et constructive dans l’intérêt des trois collectivités », qu’il accepte l’échéancier de trois ans, plutôt que d’engager de l’argent public dans des contentieux longs, couteux et inutiles !
Qui cherche, en définitive, à opposer les « territoires » ? Sinon celui qui, sitôt son élection à la présidence de la Région, a mis en doute les droits de l’Espace Sud, des habitants et des transporteurs du sud dans ce dossier et qui confond constamment négociation et diktat. Chacun aura compris dans cette affaire qui a fait preuve de patience, d’esprit de concertation, de sens de la proposition constructive et de volonté de promouvoir une indispensable équité entre les territoires et l’ensemble des citoyens de notre pays martiniquais.
Le Président de la Communauté d’Agglomération
de l’Espace Sud Martinique
Eugène LARCHER
Chronologie des initiatives prises par l’Espace Sud Martinique
entre 2006 et 2010 (jusqu’à la saisine du Tribunal administratif)
18 octobre 2006 : transmission au Conseil régional d’une demande de régularisation du versement du FIRT pour les années 2005 et 2006 revenant à l’Espace Sud et attribué à la CACEM.
10 juillet 2007 : délibération du Conseil régional prenant acte de la demande de l’Espace Sud et renvoyant à la Direction des Douanes le soin de procéder à la répartition du produit du FIRT entre la CACEM et l’Espace Sud.
29 octobre 2007 : demande aux services des douanes des clés de répartition du produit de la taxe spéciale sur les carburants entre la CACEM et la CAESM
10 janvier 2008 : courrier de la Région précisant l’état des sommes dues à l’Espace Sud.
11 février 2008 : demande aux services des douanes des clés de répartition du produit de la taxe spéciale sur les carburants entre la CACEM et l’Espace Sud.
30 avril 2008 : le Conseil Communautaire de l’Espace Sud demande au Conseil régional de prendre une délibération indiquant que la date d’application de la répartition du FIRT entre les deux communautés d’agglomération correspond à la date à partir de laquelle l’Espace Sud a pris en charge la compétence transport (janvier 2005).
17 juin 2008 : demande d’une séance de travail entre élus régionaux et communautaires et transmission des éléments du dossier.
18 Septembre 2008 : entretien téléphonique entre administratifs de l’Espace Sud et de la Région et transmission des éléments du dossier sur la répartition du FIRT.
3 Juin 2009 : transmission au service des douanes d’une demande de versement du FIRT pour les années 2007 et 2008 et d’une application rétroactive du versement.
15 octobre 2009 : la Direction des Douanes, s’appuyant sur la délibération de la Région dont les modalités d’application étaient laissées à son entière discrétion, refuse de verser le FIRT à l’espace Sud au motif que la prise en charge des dépenses de transport ne peut être assimilée à un service de transport urbain ou à l’approbation d’un plan de déplacement urbain.
9 février 2010 : transmission d’un courrier au président de Région pour que le versement des sommes dues à l’Espace Sud soit exigé de la Direction des Douanes.
08 avril 2010 : courrier de demande d’informations au président de Région sur la suite donnée au courrier du 9 Février 2010.
15 avril 2010 : remise d’un dossier sur la question de la taxe spéciale de consommation sur les carburants au président de Région lors de sa visite à l’Espace Sud.
20 mai 2010 : courrier du président de Région mettant en doute le fait que l’Espace Sud réponde aux critères d’éligibilité à la perception d’une part de la taxe.
22 juillet 2010 : l’Espace Sud saisit le Tribunal administratif sans aucune réaction de la Région.