Bondamanjak

UAG En Guerre ?




Nous publions cette tribune que nous avons reçue du Professeur Maurice Belrose, membre du Parti Communiste Martiniquais.

 

UAG :
Georges Virassamy : désavoué pour son incompétence ou victime d’une
machination ?

 

Le 10 décembre
dernier, la nouvelle est tombée, stupéfiante : Georges Virassamy,
jusqu’alors président de l’UAG, n’a pas été confirmé dans ses fonctions par le
nouveau Conseil d’administration. Le verdict est sans appel : 11voix pour
et 28 voix contre. Il s’agit apparemment d’un désaveu cinglant qui devrait normalement
le dissuader de présenter à nouveau sa candidature, voire le contraindre
moralement à renoncer à toute fonction de direction au sein de l’UAG.

 

Mais est-ce
bien le cas ? N’est-il pas plutôt victime d’une machination machiavélique ourdie
au profit de concurrents ou d’ennemis tapis dans l’ombre et attendant
patiemment leur heure ?

 

Rappelons tout
d’abord qu’en vertu des nouvelles dispositions instituées par la LRU (Loi
relative aux libertés et responsabilités des universités), le président de
l’université est élu par le seul Conseil d’Administration, alors qu’auparavant
votaient également les membres des deux autres conseils : Conseil
Scientifique (CA) et Conseil des Études et de la vie universitaire (CEVU). Cela
explique l’extrême politisation des dernières élections à l’UAG et les
stratégies de conquête du pouvoir élaborées ici et là pour éliminer Virassamy.

 

Le
pouvoir : voilà le mot qui résume la situation. En effet, la LRU ;
d’inspiration ultralibérale, confère à tous les présidents des universités
françaises, quels que soient leur grade et leur coloration politique, des
pouvoirs exorbitants, susceptibles de donner lieu à des dérives autocratiques et
de servir de terreau au favoritisme. Maintenant que Virassamy a subi cette humiliante
défaite, les ambitions ne vont pas tarder à se déchaîner, d’autant qu’il est
annoncé une nouvelle élection avant fin janvier 2009.

 

Quel intérêt
peut-on avoir à être président d’université ? Parler d’intérêt peut
paraître choquant, mais la question mérite d’être posée, car si certains
candidats sont mus essentiellement par le sens du devoir, le désir de servir
une noble cause, d’autres sont poussés par la soif du pouvoir et obsédés par
les avantages concrets liés à la fonction.

 

Le premier
avantage est que le président d’université –cela est valable également pour les
vice-présidents des trois conseils mentionnés ci-dessus- sont de plein droit
déchargés d’enseignement. Il peut, s’il le veut, conserver tout ou partie de son
service, mais avouons que la perspective de passer quatre ans – voire huit en
cas de réélection- sans enseigner est tentante et motivante ! Les
présidents touchent évidemment leur salaire et reçoivent en plus une prime qui,
pour l’année universitaire 2008-2009 se monte à 18.180,35 euros (voir arrêté du
30 octobre 2008 publié au Journal Officiel du 28 novembre 2008).

 

Ce n’est pas tout :
un maître de conférences qui a exercé les fonctions de président d’université peut
accéder au grade de professeur des universités sans avoir obtenu le diplôme
appelé « Habilitation à diriger des recherches » (HDR) et sans
subir l’épreuve de « Qualification aux fonctions de professeur des
universités ». Autrement dit, il a l’assurance de bien finir sa carrière,
avec un bon salaire, une retraite confortable, sans avoir à se fatiguer à faire
de la recherche comme ses autres collègues.

 

Deux anciens
présidents maîtres de conférences de l’UAG savourent actuellement la joie
d’avoir été promus professeurs des universités par cette voie. D’autres se
préparent à se lancer dans la course à l’élection avec cet objectif rivé dans
la cervelle.

 

Si le
président n’a pas peur de l’avion, sa fonction lui garantit par ailleurs la
possibilité de voyager dans la Caraïbe et en Europe, de remplir son carnet
d’adresses au cas où…

 

Cela dit, sa
tâche est loin d’être aisée. Le siège de l’UAG se trouvant en Guadeloupe, il
est contraint, s’il ne réside pas dans cette île, à de fréquents voyages qui
peuvent s’avérer fatigants à la longue. Il doit aussi et surtout s’efforcer de
préserver la fragile unité de l’établissement, tenir compte à la fois des
intérêts et des revendications des Guadeloupéens, des Guyanais et des
Martiniquais, sans céder à la démagogie et sans favoriser les uns au détriment
des autres.

 

S’il se montre
trop autoritaire, il court le risque d’être détesté ; s’il est mou et sans
autorité, l’anarchie s’installe et l’université est menacée de dislocation.
S’il n’est pas présent fréquemment à Pointe-à- Pitre, le risque est grand de
voir les responsables des services administratifs essayer de se substituer à
lui à la direction de l’établissement.

 

Georges
Virassamy a la réputation d’être un homme à poigne, autoritaire. Mais ce
« défaut » -qui est peut-être une qualité dans la circonstance
actuelle- suffit-elle à expliquer ce qui s’est passé récemment ? Absolument
pas ! Il a surtout péché par naïveté face à des politiciens de métier,
retors et vindicatifs. Il a signé son « arrêt de mort » politique en
commettant l’erreur de priver de responsabilité administrative quelqu’un de son
entourage qui ne pouvait se résigner à ne plus exercer aucun pouvoir, si petit
soit-il, et qui jouissait d’être adulé. Son autoritarisme réel ou supposé a
servi d’argument électoral dans une campagne initiée depuis longtemps et menée
de manière sournoise et efficace grâce au téléphone portable et à Internet.

 

En l’éliminant
de la sorte, ses ennemis et adversaires ont pris le risque de bloquer le
fonctionnement de l’UAG à un moment crucial. Les chantiers sont
multiples et urgents : intégration à l’UAG des trois IUFM ;
publication des emplois vacants, avec obligation de procéder peut-être à des
redéploiements internes ; suivi des dossiers d’habilitation des maquettes
de Licence et de Master ; approbation par le Conseil d’administration des
statuts des composantes, c’est-à-dire des différentes Facultés ;
désignation des vice-présidents des trois conseils.

 

Georges
Virassamy a-t-il été un mauvais gestionnaire? Il semble que non. La preuve en
est qu’il a été désigné « administrateur provisoire » par les
autorités supérieures, alors même que deux autres anciens présidents s’étaient
précipités pour offrir leur service, afin d’éviter que ne s’installe le chaos.

 

Maintenant va
commencer la nouvelle campagne électorale, celle prévue depuis longtemps par
les ennemis de Virassamy. La Guyane, la Guadeloupe et la Martinique auront
chacune son ou ses candidats. Le front uni contre Virassamy est d’ores et déjà
disloqué de fait par les ambitions personnelles ou claniques. La Guyane qui n’a
jamais eu « son président » ne va s’effacer au profit d’aucun
Antillais. Auparavant, il existait un accord tacite d’alternance à la
présidence entre Martinique et Guadeloupe, mais le Guadeloupéen Alain Arconte
l’a fait voler en éclats il y a quelques années au détriment du candidat
martiniquais Maurice Burac qui croyait de bonne foi que c’était son tour.

 

Dans ces
conditions, Georges Virassamy est fondé à poser de nouveau sa candidature, pour
défendre et faire valoir sa conception de la « gouvernance
» universitaire et continuer l’œuvre commencée. Une grande partie des
membres du Conseil d’administration est susceptible de changer d’opinion à son
sujet, de comprendre que la raison doit l’emporter sur la passion, que l’UAG,
dans sa phase historique actuelle, a besoin d’un président comme lui, dynamique,
habitué à la gestion, reconnu pour ses travaux scientifiques à l’échelle
nationale et internationale.

 

M. Belrose